Nous continuons ici à vaillantiser ! |
Par Jean-Louis Robert
En complément, sur le même thème:
Les héros de la Commune de Paris ont ressuscité sous le drapeau rouge des Soviets, affiche de Vladimir Kozlinsky, 1921.
De la Commune de Paris à la Révolution russe
La Commune de Paris dura du 18 mars 1871 – jour de l’insurrection populaire qui força le gouvernement Thiers à se réfugier à Versailles – au 28 mai – jour de la chute de la dernière barricade. Pourtant brève, cette expérience révolutionnaire influença durablement le mouvement ouvrier.
Fin des expulsions locatives et du travail de nuit des boulangers, alignement du salaire des élus et fonctionnaires sur celui des ouvriers, séparation entre Eglise et Etat, instruction laïque et gratuite, reprise par les ouvriers des ateliers abandonnés, etc. : les communards firent bien plus en 72 jours que ceux qui, depuis, ont prétendu réformer la société.
Les troupes de Thiers, alliées à celles de l’Empire allemand, écrasèrent la Commune lors de la « Semaine sanglante » (21-28 mai), qui fut à la mesure de la peur provoquée dans la bourgeoisie par ce gouvernement des classes laborieuses : des dizaines de milliers de morts, 15 000 condamnations dont plus de 4 500 au bagne.
La Commune nourrit la réflexion de Marx, Engels et des bolcheviks : bien que vaincue, elle fut la première forme, encore embryonnaire, d’un pouvoir des travailleurs. En Russie, malgré la répression tsariste (censure, interdiction de séjour des communards, liste noire des Russes compromis), le mouvement révolutionnaire et ouvrier naissant (populistes, anarchistes, marxistes) fut marqué par des débats autour de la Commune. Lénine évoque souvent celle-ci dans ses écrits, particulièrement durant1917 : dans sa troisième Lettre de loin rédigée le 24 mars depuis son exil, il écrit que les ouvriers « se sont engagés avec juste raison dans la voie indiquée par l’expérience de notre révolution de 1905 et de la Commune de Paris de 1871 ; ils ont créé le Soviet des députés ouvriers […] ».
Un parti pour la révolution
Pour les bolcheviks, la Commune avait manqué de préparation, d’un programme précis, d’organisation et de dirigeants unis, ce qui s’expliquait par la jeunesse du mouvement ouvrier. La seule spontanéité du prolétariat ne pouvait vaincre une bourgeoisie organisée, détentrice du pouvoir économique. Les bolcheviks réussirent là où les communards avaient échoué, montrant le rôle fondamental d’un parti révolutionnaire. Selon Trotsky (Terrorisme et communisme, 1920) : « Le parti ne crée pas la révolution à son gré, il ne choisit pas à sa guise le moment pour s’emparer du pouvoir, mais il intervient activement dans les événements, pénètre à chaque instant l’état d’esprit des masses révolutionnaires et évalue la force de résistance de l’ennemi, et détermine ainsi le moment le plus favorable à l’action décisive ». En juillet 1917, si le parti bolchevik jugea l’insurrection prématurée, il fut capable de l’organiser en octobre au moment propice.
La révolution face à ses ennemis
Pour Lénine, « malgré toutes ses fautes, la Commune est le modèle le plus grandiose du plus grandiose mouvement prolétarien du XIXe siècle » (Les enseignements de la Commune, 1908). Mais il analyse aussi ses dramatiques erreurs, dont « la trop grande magnanimité du prolétariat » qui « négligea l’importance des actions purement militaires dans la guerre civile et, au lieu de couronner sa victoire à Paris par une offensive résolue sur Versailles, il temporisa et donna au gouvernement de Versailles le temps de rassembler les forces ténébreuses et de préparer la semaine sanglante de mai ». Après le 18 mars, si la bourgeoisie ne dirigeait plus Paris, son pouvoir s’était simplement déplacé à Versailles. Au lieu de lancer aussitôt l’offensive, les communards convoquèrent des élections le 26 mars. Ces deux options, dans ce contexte, étaient incompatibles, car « pour le succès des élections, il fallait remettre la marche sur Versailles » (Trotsky, Terrorisme et communisme).
Cette leçon permit sans doute aux bolcheviks de saisir l’importance du mot d’ordre « tout le pouvoir aux Soviets », et la nécessité de la prise du Palais d’Hiver. Pour Trotsky, si la Commune avait duré, « elle aurait été obligée de recourir à des mesures de plus en plus rigoureuses pour écraser la contre-révolution ». La Semaine sanglante, démonstration de la barbarie d’une bourgeoisie dont le pouvoir est menacé, prouva que les travailleurs n’ont d’autre choix que d’utiliser tous les moyens propres à défendre leur révolution.
De l’« Etat-Commune » au communisme
Lénine évoque un « Etat-Commune », un Etat « dont la Commune de Paris a été la préfiguration » (Thèses d’avril, 1917). Car si l’expérience de 1871 prouva que la classe ouvrière ne peut pas mettre l’Etat bourgeois à son service, elle montra aussi comment elle doit briser des institutions faites pour la bourgeoisie et forger un nouvel Etat au service de son émancipation. Lénine poursuit l’analyse de Marx : « la Commune semblait avoir remplacé la machine d’Etat brisée en instituant une démocratie “simplement” plus complète : suppression de l’armée permanente, électivité et révocabilité de tous les fonctionnaires sans exception. Or, en réalité, ce “simplement” représente une oeuvre gigantesque : le remplacement d’institutions par d’autres foncièrement différentes. […] la démocratie, de bourgeoise, devient prolétarienne ; d’Etat (= pouvoir spécial destiné à mater une classe déterminée), elle se transforme en quelque chose qui n’est plus, à proprement parler, un Etat » (L’Etat et la Révolution, 1917). Un changement radical imposé à la fois par le besoin de contrer la résistance des capitalistes pendant toute une période, et par l’objectif final d’une extinction de l’Etat dans une société communiste, c’est-à-dire sans classes.
Lors
de notre réunion à Graçay (à voir au lien suivant :
il
a été fait mention d’un morceau de drapeau de la Commune de Paris déposé sur la
Lune par un véhicule lunaire soviétique, vraisemblablement au début des années
70 (?). La source en serait l’historien Marc Ferro, à l’occasion des interventions
lors de la dernière Fête de l’Humanité.
Alors
Jean-Pierre a suivi la piste, et est tombé là-dessus :
Suite
à notre réunion de lundi et à l'allusion d'Edwige concernant un morceau de
drapeau de la Commune déposé sur la Lune, voici l'article de l'ami Jean Braire
dans l'Humanité du 23 janvier 1992 :
REUNIS le matin du dimanche 25 mai 1924, salle de la Bellevilloise, les communistes du 20e arrondissement de Paris, possesseurs d'un des derniers drapeaux de la Commune, votaient le serment suivant:
«La 20e section communiste, détentrice du drapeau d'un bataillon des fédérés de la Commune - drapeau rouge du sang de l'ouvrier, drapeau ayant flotté sur les dernières barricades de Belleville - a décidé de confier à la garde du soviet de Moscou ce symbolique souvenir des luttes soutenues par le prolétariat parisien, jusqu'au jour où la classe ouvrière française aura conquis le pouvoir.»
Le dimanche après-midi, des milliers de Parisiens prêtèrent serment en passant devant le drapeau placé devant le mur des Fédérés.
Le drapeau fut ensuite confié à la délégation qui se rendit au 5e Congrès de l'Internationale communiste se tenant à Moscou, du 17 juin au 8 juillet 1924.
Le 4 juillet, Alfred Coste, qui dirigeait la délégation française, remit au soviet de Moscou le précieux souvenir qui fut déposé aussitôt près du corps de Lénine, à l'intérieur du mausolée provisoire (en bois).
Le drapeau de la Commune n'est plus dans le mausolée depuis de nombreuses années. Il se trouve au musée Lénine. Je l'ai vu en juin dernier, dans une exposition sur la Commune de Paris.
A cette époque, nous participions, avec Claude Willard, à un colloque célébrant le 120e anniversaire de la Commune.
A l'issue du colloque, les participants soviétiques décidèrent à l'unanimité de créer en URSS une société des Amis de la Commune de Paris, qui se fixa comme objectif de perpétuer de façon créatrice l'héritage révolutionnaire et démocratique de la Commune. Pressentant les événements à venir, nous demandions à cette nouvelle association de surveiller et de protéger la glorieuse relique révolutionnaire apportée de France en 1924.
Aujourd'hui, le nouveau dirigeant de la Russie a fait disparaître le drapeau rouge qui flottait sur le Kremlin, mais à quelques centaines de mètres plus loin, il est toujours là, le petit drapeau rouge des Communards, comme sont toujours là les drapeaux rouges que les ouvriers soviétiques ont refusé de descendre du fronton de leurs usines; il est toujours là le petit drapeau rouge déposé sur la Lune dans les années cinquante, avant que l'homme y pose le pied, comme sont toujours là les drapeaux rouges au poing des travailleurs manifestant sur la place Rouge.
Je me rappelle d'un poème sur le drapeau rouge qui se terminait ainsi: «Riez bourgeois au sang bleu / Riez, mais regardez-le».
Je pense qu'ils riront longtemps encore, car, malheureusement pour eux, le drapeau rouge n'est pas mort.
Jean Braire.
Et Jean-Pierre d'aller plus loin sur un autre thème (eh oui, on en a aussi discuté à Graçay) :
Pour le même thème, on peut continuer avec le bulletin 72 des Amies et Amis de la Commune de Paris:
1917 LENINE, LES BOCHEVIKS ET LA COMMUNE DE PARIS
ce qui s'est passé un
29 novembre
pendant la vie d'Edouard Vaillant
vaillantiser v tr dir
Action de redonner tout son lustre, tout son éclat, toute son importance, à une personnalité qui la méritait amplement et que l’histoire avait oubliée malencontreusement sur le bord de son chemin.
Plus simplement :
Action de remettre dans la lumière de l’histoire quelqu'un qui en avait été indûment écarté.
Ex : "C’est en 2015 que pour la première fois on a vaillantisé quelqu’un, et ce quelqu’un, c’était Edouard Vaillant lui-même."
Employé absolument, le verbe a pour complément d'objet implicite le nom propre "Vaillant".
Ex : "Le dernier numéro de notre bulletin vaillantise."
N’hésitez pas, qui que vous soyez, à l'employer partout par exemple dans des phrases du genre : Ils veulent vaillantiser Vaillant, etc.
Et bien entendu le dérivé "vaillantisation" en découle naturellement.
TOUTES NOS DATES IMPORTANTES
Rentrée littéraire de septembre 2015
Je te parle au sujet d'EDOUARD VAILLANT
Tome I : La tête pensante de la Commune.
374 p. 18,80 €
484g
les 2 volumes 1044g
L'EDITEUR
LES POINTS DE VENTE
18
Vierzon
Maison de la presse Catinaud (9 rue Voltaire)
Espace culturel Leclerc (48 avenue de la République)
Presse tabac Mongeot (4 rue du Mouton)
Bourges
La Poterne
Centre commercial Carrefour Bourges
36
Châteauroux
Cultura Saint-Maur
En voir plus :
http://vaillantitude.blogspot.fr/2015/09/1907-mort-de-sully-prudhomme.html
COMPTES-RENDUS DU LIVRE
11 3 16 JEAN ANNEQUIN BLOG COMMUNE DE PARIS
29 2 16 HENRICHEMONT GIBLOG
1 11 15 MAGAZINE A VIERZON
20 10 15 DIX-HUIT BERRY REPUBLICAIN LA BOUINOTTE
28 08 15 BLOG VIERZONITUDE
DOSSIER DE PRESSE
http://vaillantitude.blogspot.fr/2015/10/1854-naissance-de-rimbaud.html
La pensée d’Edouard Vaillant représente l’adaptation la plus parfaite du socialisme scientifique à notre tempérament national.
(Jean Jaurès)
Vaillant n'est pas seulement un grand homme pour Vierzon, il est un grand homme pour l'histoire.
(Vaillantitude)
La vaillantisation est une entreprise collective qui rassemble, et c'est tant mieux, des personnes de convictions différentes et variées qui ne regardent qu’elles. Les rapprochements avec l’actualité récente et les éventuels commentaires personnels induits n’engagent que l’auteur du blog et lui seul.
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