lundi 3 décembre 2018

LES GILETS JAUNES


Qui sont-ils et que veulent-ils ? 



Gilets jaunes devant l'hôpital de Vierzon
Samedi 1er décembre 2018 


(C'est un transfert de mail de la part de notre Ami Jean-Pierre Theurier que je relaie ici:)


Qui sont et que veulent les “gilets jaunes” ?Entretien avec Benoît Coquard, sociologue // histoireetsociete







Ugo Palheta  



Se fondant sur ses recherches antérieures et sur une enquête en cours, Benoît Coquard se propose dans cet entretien de décrire et d’interpréter sociologiquement le mouvement des « gilets jaunes », dont le prochain temps fort aura lieu demain 24 novembre.

Il donne en particulier à voir l’ancrage du mouvement dans les classes et les sociabilités populaires, les raisons d’agir et les logiques d’action des participant·e·s, et plus généralement le caractère éminemment politique de la contestation en cours, non dans un sens restreint – c’est-à-dire partisan – du mot, mais au sens où elle exprime publiquement – à partir de la question des taxes sur le carburant – une fronde généralisée contre la dégradation des conditions de travail et d’existence de la majorité de la population. 

Sociologue, Benoît Coquard travaille depuis plusieurs années sur les milieux ruraux, et est membre du CESAER (INRA, Dijon).

Tu es sociologue, spécialiste des classes populaires rurales, et tu étais sur un barrage le 17 novembre dans le cadre de la mobilisation des « gilets jaunes ». Peux-tu nous dire d’abord quelques mots sur les raisons et les conditions de cette observation mais également sur le contexte territorial que tu connais bien pour y avoir consacré ta thèse ?

J’ai passé ma journée de samedi à parler à des gens sur des barrages dans des cantons ruraux plutôt en perte de vitesse qui perdent des habitants, ont été désindustrialisés, privés des services de proximité. C’est là que se concentrent les classes populaires et que l’utilisation de la voiture est impératif afin d’avoir un travail et une vie sociale. Par la suite, je vais suivre le mouvement dans la durée pour avoir un peu de recul sur ce qui est à mon sens une mobilisation exceptionnelle, surtout dans ce type d’endroit.

Commençons par la sociologie du mouvement : qui était présent sur le barrage en termes de propriétés de classe, de genre, ethno-raciales et d’âge ?

Je vais prendre des pincettes sur ce sujet parce que je me base seulement sur mes observations, forcément partielles. Ce qu’on peut dire assurément, c’est qu’il y a beaucoup de monde, alors même que l’on se trouve dans des milieux ruraux peu peuplés et peu enclins à se mobiliser en temps normal. Les participants eux-mêmes sont surpris devant l’ampleur et la multiplicité des points de blocages dans des zones où l’on dit entre habitants qu’il ne « se passe jamais rien ». Aussi, je n’ai pas repéré, comme disent les journalistes, de «portrait robot» du «gilet jaune».

Là où je me risquerais un peu plus, c’est sur les milieux sociaux les plus représentés parmi les mobilisés, c’est-à-dire ceux qui ont passé une grande partie de leur journée sur un barrage (tandis que d’autres ont simplement posé le gilet jaune sur le tableau de bord ou liké les pages Facebook). En utilisant un indicateur forcément trop aléatoire, j’ai demandé la profession d’environ 80 personnes. Dans une région déjà très ouvrière, à 9 exceptions près (professions intermédiaires du privé, artisans, agriculteurs), celles et ceux que j’ai rencontrés appartiennent sans surprise aux classes populaires. Typiquement, il s’agissait de femmes employées et d’hommes ouvriers. Puisqu’on était samedi, c’était surtout des gens qui travaillent dans les grandes boîtes et qui étaient en weekend, il y avait aussi des chômeurs. D’autres salariés des petites entreprises les ont rejoints dans l’après-midi après le travail.

À plus grande échelle, on parle d’un mouvement interclassiste, ce qui le discrédite aux yeux de certains à gauche qui y voit un éparpillement. Mais sociologiquement, il y a une cohérence globale dans les profils rencontrés, car les «gilets jaunes» sont centrés dans la zone «en bas à droite» de l’espace social si l’on prend une grille de lecture bourdieusienne, c’est-à-dire des classes populaires aux classes intermédiaires plutôt peu diplômées et exerçant des métiers manuels. Ce sont des personnes qui ont des goûts proches, qui se côtoient au quotidien, sont en accord dans leurs visions du monde. Les proximités sociales ne sont pas réductibles aux classes « sur le papier » (pour parler comme Bourdieu), mais plutôt à des positionnements proches dans l’espace des styles de vie.

Il y avait plusieurs générations, notamment des retraités, ce qui a ravi les jeunes mobilisés. Parfois en milieu rural les relations entre générations se sont tendues, on dit des jeunes qu’ils « traînent » dans le village, mais là tout le monde était réuni et saluait cette cohésion intergénérationnelle.

Sur la question de l’ethno-racial, évidemment, dans des régions rurales où il y a eu peu d’immigration, ce sont surtout des blancs qui portent un «gilet jaune», mais il ne faudrait pas gommer la présence de quelques personnes non-blanches, qui sont elles-mêmes collègues de travail ou amis d’autres «gilets jaunes». Là où je suis allé, on ne peut pas dire qu’elles sont sous-représentées dans le mouvement au regard de la population générale.

On sait bien que les non-blancs, en France, appartiennent essentiellement aux classes populaires, donc ils peuvent se sentir concernés par les revendications de ce mouvement autour du pouvoir d’achat, de l’utilisation de la voiture, de la contestation contre le gouvernement et contre les «privilèges des riches». Ils peuvent aussi avoir dans leur entourage des amis qui participent au mouvement et les embarquent avec eux.

Lorsqu’on parle du milieu rural aujourd’hui, on insiste souvent sur le racisme ambiant et on ne saurait nier qu’il en existe. Reste que les groupes d’amis réunissent souvent des non-blancs et des blancs, même lorsque parfois ces derniers se disent favorables à l’extrême droite… C’est l’une des contradictions apparentes entre les opinions politiques et les sociabilités concrètes où l’on trouve de l’entraide.

Sur le genre, un fait remarquable à mon sens : il y avait presque autant de femmes que d’hommes alors même que, d’habitude, dans les activités publiques, ce sont les hommes qui sont placés sur le devant de la scène, particulièrement en milieu rural. Je dirais même que les femmes ont été à l’initiative de beaucoup de rassemblements, avec notamment le profil de la mère de famille divorcée et précaire que j’ai retrouvé à plusieurs reprises, ou la jeune femme célibataire.



Baumes-les-Dames (Doubs) vidéo

As-tu des éléments sur la manière dont s’est diffusé l’information sur la mobilisation (réseaux sociaux, cercles de sociabilité, contacts professionnels…) ?

Tout le monde sait que le mouvement s’est diffusé par Facebook. Mais il s’est aussi appuyé sur les réseaux amicaux pour conduire jusqu’à la mobilisation concrète. Sur Facebook, en milieu rural, on est ami avec celles et ceux que l’on connaît, cela renforce l’interconnaissance. De cette manière, on suit les pages «gilets jaunes» et quand des amis affichent leur soutien, on sent que cela va être populaire dans son entourage.

Ensuite, on va souvent se rendre à plusieurs sur les barrages, parfois on voit des groupes d’amis arriver. Ça participe, je pense, de la réussite du mouvement, parce qu’ils mettent l’ambiance et s’entraident en cas de problème. Le fait d’être entouré de ses pairs permet de donner une légitimité à la mobilisation et plus largement de se rattacher à une appartenance collective valorisante. C’est très important pour des gens qui d’habitude interviennent peu dans le débat politique, qui ne manifestent pas, ne sont pas syndiqués, sont souvent abstentionnistes.

J’insiste sur l’importance des liens qui vont se tisser au fil des jours entre « gilets jaunes » car il me semble que ledit « peuple » est souvent critiqué pour son prétendu « individualisme », et ce par des personnes qui sont de fait très éloignées des classes populaires, à la fois spatialement et socialement. Contre ce préjugé (souvent formulé par des gens de gauche) j’ai pu constater dans mes recherches que, dans un contexte de précarité grandissante des conditions de vie des classes populaires, il est important d’avoir une « bonne réputation » à l’échelle locale, et cela passe nécessairement par une inscription dans des collectifs, notamment les collectifs amicaux parce que les autres types d’encadrement (syndicaux, associatifs, etc.) tendent à péricliter.

Être une personne respectable, c’est donc aussi être « un vrai pote sur qui compter », et si vous êtes « gilets jaunes », c’est respecter sa parole lorsqu’on s’est engagé à venir pendant quelques heures « aider les copains » sur un point de blocage.

Y avait-il des élus, des militants (syndicaux ou politiques) ou des sympathisants d’organisations ?

Je n’ai pas vu d’élus locaux. Peut-être étaient-ils présent ailleurs, mais il faut rappeler que les élus ruraux sont surtout recrutés parmi les cadres supérieurs et les professions libérales, alors que cette population est très peu représentative de la population des campagnes, puisqu’on y retrouve une surreprésentation des ouvriers (32% de la population active) et d’autres catégories populaires et intermédiaires. On peut supposer que la plupart des élus ne sont pas les premiers concernés par l’augmentation du prix du carburant.

Pour ce qui est des « gilets jaunes », je ne peux pas trop me prononcer sur leur appartenance politique parce que les uns et les autres hésitent souvent à dire pour qui ils votent, déjà parce qu’on sait que, sur un même point de blocage, tout le monde n’est certainement pas d’accord, et aussi parce que le mouvement s’inscrit dans une dynamique de rejet de la politique institutionnelle. D’ailleurs, là où j’étais, j’ai surtout entendu celles et ceux qui se disent abstentionnistes, puisqu’ils peuvent être dans une plus grande cohérence avec le mouvement.

Ensuite, même dans des régions rurales marquées par un survote à l’extrême droite, il faut rappeler que le FN n’est pas dans l’ensemble un parti de militants de terrain, donc on ne voit pas d’encartés FN, ou alors ils se font discrets. Il y avait par ailleurs quelques ouvriers syndiqués qui ce jour-là n’avaient pas leur badge (les syndicats ont été critiqués pour leur compromission avec le pouvoir).

De manière générale, pour tout ce qui concerne l’étude du mouvement, il faudra du temps de recherche pour avancer les premières conclusions et aller au-delà des discours journalistiques et des récupérations politiques. En ce qui concerne les thématiques politiques débattues sur place, c’est la question des taxes et du pouvoir d’achat qui est fédératrice à la base. Mais on entend surtout des dénonciations récurrentes des inégalités entre riches et pauvres, entre « ceux qui se gavent » et « ceux qui bossent ». La suppression de l’ISF est revenue à plusieurs reprises pour justifier « d’être là », j’ai entendu des revendications sur les bas salaires aussi, l’injustice que les ouvriers fassent des métiers difficiles et soient moins payés, ainsi que des critiques contre les camionneurs d’Europe de l’Est.

On peut supposer qu’à mesure que le mouvement va se poursuivre, il y aura des divisions qui vont faire ressurgir certains clivages politiques, mais pour l’instant on est sur une entente « contre » le gouvernement et différentes inégalités fiscales ou simplement entre riches et pauvre.  Lors de cette première journée de mobilisation, la mise de côté des affiliations politique a permis à mon sens de faire émerger des raisons communes de se mobiliser en tant que l’on appartient plus ou moins à des catégories proches socialement, notamment en termes de conditions matérielles d’existence et de visions du monde. Quand on est employé·e ou ouvrier·ère en milieu rural, de droite mais aussi parfois de gauche, ou souvent ni l’un ni l’autre, on peut toujours s’accorder sur les difficultés de la vie quotidienne, le rapport au travail et au territoire, etc.

Qu’est-ce qui se disait sur le barrage ? En particulier, dirais-tu que la colère excédait la question des taxes et, si oui, comment s’exprimait-elle ? As-tu vu ou entendu des choses révélatrices sur leurs raisons d’être là, d’agir et de se mobiliser collectivement ?

En lien avec ce que je viens de dire, ça ne parlait pas beaucoup politique au sens restreint du terme. Par contre, il y avait beaucoup de discussions logistiques (savoir comment faire, comment réagir,...). Tout cela s’apprend sur le tas dans un tel mouvement spontané et laisse l’initiative à celles et ceux qui paraissent les plus motivés et les plus charismatiques.

Certains qui étaient organisateurs des pages Facebook se retrouvaient un peu en retrait, tandis que d’autres moins actifs sur Internet l’étaient plus sur le terrain. Ça rigolait beaucoup, c’était assez festif sur certains barrages, on passait de la musique, de Renaud ou Zebda pour le côté contestataire, jusqu’à Vegedream pour célébrer la victoire des Bleus. La Marseillaise était également dans la playlist, l’hymne était repris en chœur et relançait le côté « Gaulois réfractaire » qu’on peut voire écrit sur certains gilets.  La figure du « Français » n’étant pas mise avant contre l’étranger, à la manière de l’extrême droite, mais plutôt en référence à un esprit contestataire : on pouvait entendre crier « révolution ! » après la Marseillaise…

La plupart des échanges étaient des conversations cordiales entre celles et ceux qui ne s’étaient pas vus depuis longtemps, cela permet de recréer des liens alors que tout se morcelle par ailleurs en milieu rural. Ensuite, on entendait beaucoup de critiques ciblées contre « les taxes », plus que contre « les impôts » d’ailleurs qui n’étaient guère évoqués.

Evidemment, il y a les blagues et insultes contre Macron, notamment sur les banderoles, moins contre les personnalités du gouvernement parce qu’on ne les connaît pas ou peu. Et, plus largement, il y a un consensus, qui s’exprime différemment de la résignation jusqu’à la colère parfois violente, contre les « privilèges des riches » ou simplement contre les groupes qui semblent mépriser le mouvement, les critiques contre « les bobos qui comprennent rien » vont dans ce sens.

Il y aussi, mais plus rarement dans ce que j’ai observé, des propos contre les « assistés » que constitueraient les populations les plus démunies. Enfin, je n’ai pas observé de propos racistes, alors que c’est assez fréquent sur d’autres scènes de vie collective en milieu rural et que l’on peut supposer que des incidents racistes émailleront par endroits un mouvement qui s’étend sur toute la France. La mobilisation des « gilets jaunes », en étant ciblé contre les taxes et la répartition des richesses, met un peu en suspens les thématiques de l’extrême droite, et le déroulement des blocages renforce l’idée que l’on fait partie des mêmes catégories sociales.

Une petite scène vue sur un barrage : un automobiliste fait mine de ralentir et force soudainement le passage. Il percute une dame sans la blesser, mais tout le monde l’a vu et au départ reste interloqué, car l’ambiance générale est très calme et les rapports sont jusqu’alors chaleureux et solidaires avec la grande majorité des automobilistes bloqués. Une partie des gilets jaunes poursuivent alors la voiture à pieds, tandis que les gendarmes s’interposent pour protéger le chauffard immatriculé en région parisienne. Un quinquagénaire à l’ethos bourgeois ouvre la portière, il est vêtu d’un costume (chemise et pantalon) alors que les « gilets jaunes » ont surtout des habits de travail, de sport, ou des tenues de chasse. Le conducteur sort sans s’adresser aux manifestants à qui il lance un regard dédaigneux. Réactions : « c’est un riche, il s’en fout de nous », « avec le bide qu’il a, il doit bien manger », « pour lui on est de la merde », « les flics feront rien, ils sont au dessus des lois ces gens-là ».

Avec ce genre de petits évènements qui soude les personnes présentes, la mobilisation peut entretenir une conscience commune contre certains symboles, comme celui du « riche » qui ne subit pas l’augmentation des taxes. Les manifestants pouvaient en fin de journée identifier des profils types de conducteurs plus ou moins « sympas » et solidaires du mouvement, entre « les routiers », « les gars du bâtiment » et « les infirmières » qui encouragent vivement les « gilets jaunes », et les rares «  têtes de cons » qui « font les pressés », « baissent même pas la vitre ».

Un petit groupe décrivait ainsi le mouvement comme soutenu par « tout le monde », sauf « les gros riches » et « les cas soc’ qui ont pas de voiture », dans une vision du monde typique de ce qu’Olivier Schwartz a nommé la conscience triangulaire des classes populaires (mise à distance des plus riches et des plus précaires).

Une opposition s’exprime aussi clairement entre ceux « qui comprennent » et ceux qui méprisent. Cette dernière attitude est associée de leur point de vue à un éloignement social. Ce qui est assez juste je crois, car les prises de position méprisantes à l’égard des gilets jaunes émanent de personnes appartenant aux classes dominantes ou, du moins, qui sont très peu en contact avec les milieux sociaux auxquels les « gilets jaunes » appartiennent.

On sait que la colère sociale trouve bien souvent des occasions inattendues de s’exprimer et qu’à ce titre elle surprend généralement les organisations. Ici ce sont les taxes sur le carburant mais on sait que la limitation de vitesse à 80 km/h avait déjà été beaucoup discutée et critiquée dans ce segment des classes populaires. Comment analyser cela sociologiquement, c’est-à-dire à partir de la transformation en milieu populaire des conditions de travail, de l’habitat, des formes de sociabilité, etc. ?

Les populations rurales doivent parcourir de plus en plus de kilomètres. Si on pense à la journée typique d’une mère de famille par exemple qui va déposer un enfant à la crèche à 10 kilomètres, un autre à l’école primaire à 15 kilomètres, qui ensuite va travailler dans un call-center ou un hôpital situé à 25 kilomètres, puis qui fait les courses dans le supermarché situé à 20 kilomètres… À cela s’ajoute que les amis et la famille n’habitent pas toujours le même canton, donc on parcourt encore des kilomètres pour se voir.

Tout ça s’accumule, et quand on est pressé par différentes tâches domestiques et contraintes au travail, difficile de se tenir aux 80km/h, surtout sur des routes droites et dans une voiture récente pour laquelle on s’est endetté. Les radars automatiques (ils sont d’ailleurs recouverts d’un gilet jaune à certains endroits) incarnaient déjà ce sentiment de « racket » organisé « par l’État », alors que le rapport à la voiture est contraint.

Ensuite les 80km/h sont venus s’ajouter à la fronde contre la pénalisation des déplacements routiers, avec aussi la récurrence des contrôles de la gendarmerie en milieu rural. D’un côté, ce sont des milieux qui valorisent de pouvoir être autonome dans les déplacements, et d’un autre côté d’être propriétaire et de construire sa maison. Pour cela ils sont prêts à s’éloigner des centres économiques, mais ensuite, ils se retrouvent dépendants de la voiture et voient parfois exploser leurs prévisions budgétaires, avec des dettes souvent.

Tout ça pour dire que ce n’est pas nouveau de se politiser autour de la voiture et de penser que c’est un « vrai sujet » de débat politique. Simplement jusqu’à maintenant, les colères restaient peu visibles pour un personnel politique qui n’est pas du tout composé de gens issus des classes populaires rurales. Si on pense par exemple aux groupes Facebook qui signalent où sont les gendarmes, autrement dit la version numérique des appels de phares, c’est déjà une forme d’entraide contre les amendes routières, de même que la vernalisation récurrente des radars automatique. Le prix de l’essence vient alimenter cette opposition jusqu’alors restée peu visible. Certains sur les blocages ont aussi rappelé le fait que l’État abandonne le territoire en fermant les services, les lignes de bus et les TER, donc contraint à toujours prendre la voiture tout en taxant son utilisation.

Cet aménagement du territoire et plus largement la répartition des emplois (et donc des milieux sociaux) contribuent à renforcer l’opposition des styles de vie entre urbain/rural, Paris/Province. Du point de vue des « gilets jaunes », cela alimente l’idée d’une coupure entre d’un côté « ceux qui bossent », les « vrais gens », et de l’autre la classe politique ainsi que les populations privilégiées des centres urbains ou même des espaces ruraux.

Sur un barrage, un automobiliste reproche ainsi à un « gilet jaune » d’être « contre les riches », ce à quoi le jeune ouvrier répond qu’il n’est pas normal à ses yeux qu’un « maçon soit payé le SMIC » alors que l’automobiliste (se disant cadre commercial) affirme « très bien gagner sa vie ». Il y a quand même des scènes qui rappellent les gens à leur condition au-delà d’une sensibilité politique ou d’une appartenance territoriale, et ce alors même qu’en milieu rural, les frontières de classes sont parfois floues du fait de l’entremêlement des fonctions au travail entre patron et salarié, ou qu’il n’est pas rare de se retrouver le weekend dans le même club de football ou la même société de chasse que son patron…

Initialement, beaucoup ont vu et présenté ce mouvement comme intrinsèquement lié à l’extrême droite. Qu’en penses-tu à partir de tes observations (d’autant plus importantes qu’elles portent sur des zones rurales où le FN est électoralement très puissant) ? Est-ce que tu as pu constater un déplacement des discours d’un plan social (la vie chère, les bas salaires, etc.) vers des thématiques nationalistes, xénophobes ou racistes ? Et cette question de l’instrumentalisation par l’extrême droite a-t-elle été discutée là où tu étais présent ?

On peut prendre le problème par l’autre bout, en se demandant d’abord pourquoi le mouvement a été assimilé à l’extrême droite. Si c’est simplement du fait qu’une partie des « gilets jaunes » vont déclarer avoir voté ou être favorable à Le Pen, il faut rappeler qu’il s’agit d’un mouvement de grande ampleur et que l’extrême droite et les idées qu’elle porte se sont implantées depuis longtemps dans la population générale, pas seulement dans l’électorat d’extrême droite.

C’est d’autant plus vrai qu’il y a des effets de lieux : dans les régions rurales anciennement industrielles, cela va bien au-delà des seuls électeurs de Marine Le Pen : se dire pro-extrême droite n’est plus un tabou, on le voit même chez des abstentionnistes ou des électeurs de la droite classique. Pour une partie des habitants, c’est même devenu une forme d’affirmation d’une respectabilité minimale, une manière d’attester que l’on est un « vrai Français », que l’on n’est pas un « cas social », et que l’on se rattache à une forme de pensée aujourd’hui devenue « normale » sur la place publique, souvent incarnée localement par une petite bourgeoisie de commerçants et d’artisans, de personnes « à leur compte » dont on valorise le courage au travail et qui ont un peu de pouvoir à leur échelle.

Pour autant, ce n’est pas le FN (ni un quelconque parti) qui a organisé ou récupéré le mouvement. Comme le montrent les travaux de Pierru et Vignon, en milieu rural, le FN n’est guère présent sur le terrain au regard de ses scores électoraux, peu de personnes osent prendre leur carte et militer. De fait, les « gilets jaunes » peuvent sincèrement se revendiquer indépendants, c’est un mouvement spontané, éclaté, avec forcément, dans la masse des gens mobilisés, une part certainement importante d’électeurs FN, mais qui, à partir de ce que j’ai pu voir, ne se présentent pas comme tel et n’ont pas apporté dans le mouvement des revendications spécifiques à l’extrême droite.

Par contre, des vidéos faisant la promo de l’extrême droite par différents moyens sont très diffusées sur Facebook et ce depuis plusieurs années : on voit notamment émerger des figures d’extrême droite qui sont spécialistes de cet exercice qui consiste à analyser la société et donner son point de vue d’une manière apparemment spontanée, avec un format de vidéo qui marche, des manières de parler qui accrochent. Vu l’importance des groupes d’extrême droite, il est donc logique que ces vidéos se retrouvent sur les groupes des « gilets jaunes », ça fait partie de l’offre disponible et accessible. Même si l’on cherche à éviter la récupération politique, il n’est pas facile de se repérer au milieu des différentes vidéos « coup de gueule » aux apparences spontanées qui ont initié le mouvement.

On note aussi que des vidéos étiquetées de gauche (comme « Osons Causer ») ont été partagées sur plusieurs pages, donc quand une vidéo critique de gauche est disponible et accessible, elle peut être reçue. On a aussi vu passer sur Facebook des messages contre le racisme, au motif que tout le monde serait dans le même bateau face aux taxes. Enfin, il faut rappeler que sur les pages Facebook et dans les rassemblements, les organisateurs appellent à ne pas afficher une appartenance politique, ni même syndicale. On voit des drapeaux français, des pancartes contre Macron, la précarité, la vie chère.

Plus largement, à mesure que le mouvement se développe, on voit beaucoup de montages photos ou des vidéos circuler autour des inégalités salariales et même contre les violences policières qui peuvent à certains endroits être exercées à l’encontre de « gilets jaunes ». Par la force des choses, dans un mouvement, les thématiques se rejoignent ou se heurtent. Mais devant la prolifération de pages internet, je crois qu’il faut surtout sortir de son bureau et regarder ce qui se passe sur le terrain pour comprendre en quoi consiste le mouvement.

Ce qui se dit du mouvement, par une multiplication des analyses hors-sol, reflète d’ailleurs les fortes polarisations du monde social, entre classes dominantes et classes dominées mais aussi entre pôle culturel et pôle économique. Même en milieu rural, les clivages autour du mouvement font ressortir ces oppositions structurelles souvent euphémisées par l’interconnaissance.

Le mouvement « gilets jaunes » est ainsi discrédité par ceux qui, notamment dans la petite ou moyenne bourgeoisie de gauche, n’y voient pas une cause noble car elle serait trop liée à des intérêts individuels, et aussi parce que nombre des « gilets jaunes », si on les interroge, vont pour une bonne part d’entre eux être contre les grèves dans la fonction publique, contre l’immigration, etc. Pour autant, ce qui les a fait se mobiliser ici, ce sont des revendications liées au pouvoir d’achat et donc à la répartition des richesses.

La thématique de la voiture et des « taxes » est liée à celle des salaires, et donc du travail (entre précarisation économique et dispersion géographique de l’emploi en milieu rural). Il est compliqué de séparer la fronde contre les taxes et les revendications pour des conditions de vie décentes. On peut choisir de simplement déplorer la vision du monde qui est aujourd’hui celles de ces classes populaires « gilets jaunes » qui ne lisent pas la presse critique et sont parfois imprégnées d’un discours d’extrême droite largement diffusé dans les médias, mais il faut aussi avoir en tête que leur mobilisation inattendue est le signe de la persistance d’intérêts communs contre la dégradation de leurs conditions d’existence, au travail et en dehors.



Au rond-point de Penn ar Chleuz, à l’entrée nord de Brest (Finistère)

Dans quelle mesure ces observations prolongent-elles les acquis de tes recherches antérieures sur les classes populaires rurales, les effets de la précarisation et de la montée des concurrences sur le marché du travail, leur quête d’une « bonne réputation », etc. ?

C’est un peu tôt pour faire le lien, il faut mener des recherches au long cours, pas seulement une brève observation d’une mobilisation nouvelle. Je dirais simplement que ça renforce l’idée que les choses de la vie quotidienne sont politisées. Ceux qui parlent d’« apolitisme » ou d’ « individualisme » ne portent pas les bonnes lunettes, ils restent dans une définition légitimiste de la politique centrée sur l’engagement partisan, le vote.

Ça rappelle aussi une chose importante qui est, je crois, la persistance d’une vision conflictuelle du monde social au sein de ces populations. Les concurrences pour l’emploi par exemple, sont vécues au quotidien, souvent contre des proches que l’on connaît depuis longtemps. L’idée qu’il y a des intérêts antagonistes dans la société est une évidence dans ces milieux sociaux, le mouvement ressasse cette conviction à plus grande échelle, même si le lexique utilisé pour nommer les choses n’est pas celui de la lutte des classes.

Enfin, c’est vrai qu’à mesure que le mouvement gagne en popularité, le fait d’y participer dans des territoires où, comme on dit, « tout le monde se connaît », peut permettre de montrer que l’on existe et que l’on est concerné par des revendications perçues comme légitimes, liées au fait d’avoir une voiture et se rendre au travail. S’investir en temps dans le mouvement est alors valorisé dans l’entourage. Déjà le premier jour, on pouvait entendre beaucoup de remarques autour du mérite de ceux et celles qui étaient là depuis le petit matin, tandis que l’on anticipait déjà une forme de ralliement opportuniste chez les automobilistes qui mettent un gilet sur le tableau de bord pour qu’on les laisse passer plus vite le barrage.




Puttelange-lès-Thioville, Moselle

Comment peut évoluer cette mobilisation selon toi, d’après tes observations ? En d’autres termes : que disaient les personnes présentes sur les suites possibles ? Est-ce qu’on faisait un lien sur les barrages, pour celles et ceux qui ont un emploi, avec ce qui se joue dans les entreprises, la question des salaires notamment ?

On va essayer de ne pas faire dans la voyance, d’autant que c’est un mouvement attrape-tout, dont l’avenir va grandement dépendre de la réaction de Macron et de son gouvernement, ainsi que du traitement médiatique qui en est fait parce qu’une part importante des « gilets jaunes » m’a paru très sensible et craintive par rapport à l’image donnée par « TF1 » et « BFM ». Les plus pessimistes passent pour le moment pour les plus lucides, mais je crois que ce n’est pas spécifique au mouvement des « gilets jaunes ».

De ce que j’ai vu, le premier jour de barrages, les gens ne savaient pas ce que ça allait donner. On se disait alors qu’il était bon de se réunir, de « faire au moins quelque chose ». C’est un moyen de garder la face, d’ailleurs l’utilisation du terme « gaulois », que beaucoup d’observateurs associent d’amblée à l’extrême droite, est aussi une manière de montrer que l’on ne se laisse pas faire, qu’on a sa fierté et son honneur. Tout ça est attisé par l’image de Macron, les remarques autour d’un président qui n’en aurait « rien à foutre de nous » sont revenues sans arrêt, à tous les endroits. Les « gilets jaunes » voient en lui le représentant d’une élite méprisante et sûre d’elle-même.

Ensuite, les manifestants (et moi-aussi) pensent que les chiffres de la mobilisation donnés dans un premier temps par le gouvernement sont très sous-estimés et cela les a encore plus agacés au soir de la première journée et motivés pour continuer… Passer douze heures dans le froid à tenir un barrage, alors même que l’on n’est pas habitué des manifestations, et se rendre compte que le gouvernement fait comme si le mouvement était anecdotique, forcément ça énerve.

Aussi, il y a une logique plus profonde qui pourrait favoriser le prolongement du mouvement. En milieu rural, les barrages permettent aux gens de se rencontrer ou de revoir des vieilles connaissances. Ils reçoivent aussi beaucoup d’encouragements d’automobilistes, les cas d’embrouilles sont très rares. Dans les zones rurales en déclin où les lieux de vie comme les bistrots ont massivement fermé, où l’emploi s’individualise et les associations disparaissent, c’est donc un moyen de recréer du lien et d’avoir le sentiment de se rattacher à une histoire plus vaste aussi.

J’ai trouvé que les « gilets jaunes » mobilisés étaient très satisfaits de cet aspect humain et pour cela, je pense qu’ils seront prêts à recommencer pendant un bon moment, tant qu’il y aura des copains de mobilisés. Il y a aussi celles et ceux qui n’ont pas osé y aller le premier jour et qui ont sorti le gilet sur le tableau de bord en voyant l’ampleur des barrages, et qui maintenant suivent le mouvement de plus près, jusqu’à peut-être s’engager concrètement sur un point de blocage.

Ensuite, je n’ai rien entendu à propos des liens avec d’autres mouvements, parce que c’est trop tôt et que l’idée d’un mouvement qui se dit indépendant a bien fonctionné. On parle plutôt du soutien éventuel des routiers, des agriculteurs. Ce que je peux dire, c’est que les personnes mobilisées insistent sur leur ras-le-bol de tout, pas seulement d’une taxe sur le carburant. On critique « toutes les taxes » puis « tout ce qui augmente ». Il y a un discours du type « nous sommes des vaches à lait », ou alors un pas « assez pauvres pour les allocations » et pas « assez riches pour tricher », qui est plutôt l’argument des fractions stables des classes populaires ou même des classes intermédiaires.

Mais il y a aussi les paroles de celles et ceux qui disent tout simplement ne plus s’en sortir, mettre l’essence par tranches de 15 ou 20 euros. Il y a une privation tout au long de l’année, malgré l’emploi. J’ai pu entendre pas mal de remarques sur le travail, tant au sujet des chauffeurs routiers polonais que sur le management dans l’entreprise, les pressions de la hiérarchie pour pousser les salariés à démissionner, la diminution des primes, l’impossibilité de s’unir contre le patron en raison des risques pour son emploi ou simplement pour ne pas perdre une journée de salaire. C’est intéressant car le mouvement ne porte pas sur le travail a priori. Mais ce que l’on ne peut plus ou que l’on n’ose plus faire dans le secteur du travail, on le fait un peu par l’intermédiaire du mouvement des « gilets jaunes ».

Certains observateurs discréditent le mouvement du fait non seulement qu’il ignorerait l’écologie mais aussi parce qu’il mélangerait trop de personnes politiquement divergentes et avancerait des revendications trop diverses, voire contradictoires. Mais tout est lié quand on voit leur quotidien. La voiture permet d’aller au travail. C’est par rapport au prix de l’essence et des dépenses incompressibles qu’on peut évaluer son salaire. Aussi, le mouvement permet des revendications territoriales, comme c’était déjà le cas avec les 80 km/h. On peut pointer les fermetures de services publics, etc., qui augmentent les distances à parcourir en voiture.

Les « gilets jaunes » sont mobilisés dans leurs lieux de vie et mettent en avant des problématiques locales qui concernent tout leur mode de vie. Cela renforce l’idée que ce qui se dit dans le champ politique est abstrait et « déconnecté » de la réalité, tandis que les revendications du mouvement portent sur des choses de la « vraie vie ».



Toutou protestataire en Moselle-Est


Merci à Contretemps
Source: 


Date de parution de l’article original: 23/11/2018

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Libellés: Gilets jaunes | Révoltes logiques | Mouvements sociaux | Douce France  


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Read in my feedly.com







Cet article eut le don de me remembrer un court texte de soutien qu'un ami (au sens courant, il n'est pas membre de l'association) rédigea en soutien aux gilets jaunes, et qu'il présentait aux barrages pour capter la bienveillance des gardiens de ronds points, et passer ainsi plus aisément qu'un autre qui manifesterait de la mauvaise volonté. 




Il manifesta une certaine surprise quand je lui dis que je connaissais la chanson de la fin du mouvement boulangiste qui l'a inspiré, et que même je l'avais utilisée moi-même quand il s'agissait de réagir aux attaques contre le code du travail (d'inspiration vaillantique) par le gouvernement précédent. On peut le voir ici: 



Je lui ai montré que j'avais remarqué qu'il était passé d'une pétition de principe typiquement anarchiste (plus de gouvernement) à une autre, davantage républicaine (plus ce gouvernement). 
Il me dit qu'il en était bien d'accord, qu'il l'avait fait délibérément. Il ajouta qu'il avait aussi rédigé, à partir du refrain et non des couplets, d'autres variations qu'il m'a demandé de rajouter ici, ce que j'ai fait volontiers. 



LA COMPLAINTE DES GILETS JAUNES


Il nous piqu’ not’ pognon
Philippe et Castaner
Ils nous déclar’nt la guerre
Les automobilistes
Conchient les macronistes
Faut plus c’gouvernement
Pour être heureux vraiment
Faut plus c’gouvernement


L’gouvernement d’Macron
Ils nous prenn’nt pour des cons
Philippe et Castaner
On leur bott’ le derrière
Les automobilistes
Conchient les macronistes
Pour être heureux vraiment
Faut plus c’gouvernement
Pour être heureux vraiment
Faut plus c’gouvernement


L’gouvernement d’Macron
Est pour les gros patrons
Philippe et Castaner
Sont là pour leurs affaires
Les automobilistes
Conchient les macronistes
Pour être heureux vraiment
Faut plus c’gouvernement
Pour être heureux vraiment
Faut plus c’gouvernement


L’gouvernement d’Macron
C’est un systèm’ bidon
Philippe et Castaner
Nous jett’nt dans la misère
Les automobilistes
Conchient les macronistes
Pour être heureux vraiment
Faut plus c’gouvernement
Pour être heureux vraiment
Faut plus c’gouvernement


J'avoue que j'en fus quelque peu titillé, et l'idée me vint d'insérer ses refrains dans des couplets que j'ai rajoutés en copiant pour l'essentiel, avec quelques adaptations pour coller à l'actualité, ceux que j'avais faits précédemment. Ce qui donne:





LE CHANT DES GILETS JAUNES

A chaque coin de rue
Le travailleur marron
Sur l’affiche se rue
Des candidats d’Macron
On voit beaucoup d’promesses
Ecrites sur le papier
Mais l’peuple ne vit pas d’messes
Alors ça l’fait crier

Il nous piqu’ not’ pognon
Philippe et Castaner
Ils nous déclar’nt la guerre
Les automobilistes
Conchient les macronistes
Faut plus c’gouvernement


Les rich’s qui s’engraissent
De réforme en réforme
Voient leurs impôts qui baissent
Ceux des pauv’s sont énormes
On leur promet tout rose
Mais quand on est élu
Ça n’est plus la même chose
On leur tourne le cul !

Tous ces énergumènes
S’impos’nt dans les médias
Vous débitent leurs rengaines
Et répèt’nt à tout va :
« Moi j’pense toujours à vous
Moi je suis votre ami
Les aut’s val’nt pas un clou »
Mais l’populo leur dit :

L’gouvernement d’Macron
Ils nous prenn’nt pour des cons
Philippe et Castaner
On leur bott’ le derrière
Les automobilistes
Conchient les macronistes
Pour être heureux vraiment
Faut plus c’gouvernement


Surtout les macronistes
Cett’ troup’ de députés
Sont tous des arrivistes
Aussi bêt’s que butés
Y a pas à s’y méprendre
Qu’ils soient ni roug’s ni blancs
Il vaudrait mieux les pendre
Que d’leur fout’ de l’argent

Tu leur paies des ripailles
Toi, peuple souverain
Et lorsque tu travailles
A peine as-tu du pain
Ne sois donc plus si bête
Quand tu iras voter
Ejecte leurs binettes
Et tu pourras chanter

L’gouvernement d’Macron
Est pour les gros patrons
Philippe et Castaner
Sont là pour leurs affaires
Les automobilistes
Conchient les macronistes
Pour être heureux vraiment
Faut plus c’gouvernement


De toute cett’ histoire
Voici la conclusion
L’électeur c’est notoire
N’a pas tout’ sa raison
Je n’suis pas fataliste
J’ai encore foi en toi
Ne sois pas macroniste
Ami voici pourquoi :

L’gouvernement d’Macron
C’est un systèm’ bidon
Philippe et Castaner
Nous jett’nt dans la misère
Les automobilistes
Conchient les macronistes
Pour être heureux vraiment
Faut plus c’gouvernement









Pour ceux qui voudraient avoir l'air...
Cliquer sur l'image. 




Et pour ceux que les textes intéresseraient:


Faut plus d'gouvernement

François Brunel 


1889



À chaque coin de rue
Le travailleur surpris
Sur l’affiche se rue
Des candidats d’Paris
On voit beaucoup d’promesses
Écrites sur le papier
Mais l’peuple ne vit pas d’messes
Alors ça l’fait crier



L’gouvernement d’Ferry
Est un système pourri
Ceux d’Floquet, de Constans
Sont aussi dégoûtants
Carnot ni Boulanger
Ne pourront rien changer
Pour être heureux vraiment
Faut plus d’gouvernement


Le gros ventru qu’engraisse
L’suffrage universel
Vient vous battre la grosse caisse
Comme monsieur Géraudel
Il vous promet tout rose
Mais quand il est élu
Ça n’est plus la même chose
Il vous tourne le cul !

Certains énergumènes
Débitants de discours
Vous redisent les rengaines
Qu’on entend tous les jours
Moi j’suis un homme intègre
Moi j’suis un érudit
Mon copain est un pègre
Mais l’populo leur dit :


L’gouvernement d’Ferry
Est un système pourri
Ceux d’Floquet, de Constans
Sont aussi dégoûtants
Carnot ni Boulanger
Ne pourront rien changer
Pour être heureux vraiment
Faut plus d’gouvernement



Même des socialistes
Membres de comités
Soutiennent des fumistes
Qui s’portent députés
Y’a pas à s’y méprendre
Qu’ils soient rouges, bleus ou blancs
Il vaudrait mieux les pendre
Que d’leur foutre vingt-cinq francs[1]

Tu leur paies des ripailles
Toi, peuple souverain
Et lorsque tu travailles
À peine as-tu du pain
Ne sois donc plus si bête
Au lieu d’aller voter
Casse-leur la margoulette
Et tu pourras chanter


L’gouvernement d’Ferry
Est un système pourri
Ceux d’Floquet, de Constans
Sont aussi dégoûtants
Carnot ni Boulanger
Ne pourront rien changer
Pour être heureux vraiment
Faut plus d’gouvernement


De toute cette histoire
Voici la conclusion
L’électeur c’est notoire
N’a pas tout’ sa raison
J’n'aim’ pas le fataliste
Je n’ai ni foi ni loi
Je suis abstentionniste
Ami voici pourquoi :



L’gouvernement d’Ferry
Est un système pourri
Ceux d’Floquet, de Constans
Sont aussi dégoûtants
Carnot ni Boulanger
Ne pourront rien changer
Pour être heureux vraiment
Faut plus d’gouvernement



[1] Les vingt-cinq francs dont il est question sont ceux de l’indemnité parlementaire, telle qu’elle resta fixée du début de la IIe République à la Grande Guerre, avec entre temps la parenthèse du Second Empire. On se rappelle que lors du coup d’État de 1851, le député Baudin s’était fait tuer sur une barricade en déclarant : « Vous allez voir comment on meurt pour vingt-cinq francs », en réponse à un Parisien mécontent qui venait de lui lancer : « Croyez-vous que nous allons exposer notre vie pour défendre vos vingt-cinq francs ? » L’anecdote est racontée par Victor Hugo dans son Journal.


Un prolongement de cette rencontre en forme de réflexion peut légitimement, me semble-t-il, être trouvé dans cet article, qui date de l'année vaillantique, d'un qui signe opportunément "Vingtras", et qui présente ainsi son profil: "historien,auteur-réalisateur de films". 
Il regrette amèrement que la république versaillaise ait supplanté sans vergogne, pour notre plus grand dommage, la république démocratique et sociale à laquelle aspiraient les gens de la Commune. 
Et comme on retrouve Arthur Rimbaud, on est assuré "en même temps" de faire plaisir à Michel Pinglaut. 



"Et j'ai vu quelquefois ce que l'homme a cru voir"
16 AOÛT 2015 PAR VINGTRAS BLOG : VINGTRAS

Je cite ce vers d'Arthur Rimbaud car il me trotte dans la tête aujourd'hui où nous mettons "un pied dans l'hiver" puisque nous entrons dans un temps qui va être marqué par les convulsions de la rentrée...

Je le cite également car ce sublime poème qu'est "Le bateau ivre" est une métaphore prémonitoire de l'état de la société française. Non seulement il dépeint cette république bourgeoise et réactionnaire des "honnêtes gens" qui a suivi la Commune, mais il annonce aussi - à quelques rares exceptions ponctuées par des ruptures historiques - le devenir commun voire trivial des deux républiques, qui ont succédé à la Troisième.

"Mais, vrai, j'ai trop pleuré. Les aubes sont navrantes. / Toute lune est atroce et tout soleil amer./ L'âcre amour m'a gonflé de torpeurs enivrantes. Oh ! que ma quille éclate ! Oh ! que j'aille à la mer !

Si je désire une eau d'Europe, c'est la flache / Noire et froide où vers le crépuscule embaumé / Un enfant accroupi, plein de tristesse, lâche / Un bâteau frêle comme un papillon de mai.

Je ne puis plus, baigné de vos langueurs, ô lames, / Enlever leur sillage aux porteurs de cotons, / Ni traverser l'orgueil des drapeaux et des flammes, / Ni nager sous les yeux horribles des pontons !"

Où va nous entraîner l'aventure incertaine de ce quinquennat médiocre et désolant comme un vieux rafiot qui prend l'eau ?

"Ouvrez votre narine aux superbes nausées, / Trempez de poisons forts les cordes de vos cous / Sur vos nuques d'enfants baissant ses mains croisées, / Le poète vous dit : O lâches, soyez fous !"*

* "Paris se repeuple"





Et si après tout cela vous n'êtes pas encore rassasié, nourrissez-vous de ce qui suit, en vous régalant de ce que vous approuvez, et en vomissant, à la manière romaine, ce que vous ne pouvez décidément pas digérer (pour mieux repartir). Bref, il y a là à boire et à manger, voire à régurgiter. 


Michel Onfray.com

L’insurrection, et après ?

Pour l'heure, ce qui advient avec les gilets-jaunes ressemble à s'y méprendre aux prémices d'une révolution. L'histoire de la Révolution française, mais aussi celle des autres révolutions, intéresse le libertaire que je suis parce qu'on peut y pointer le moment où la générosité qui préside à un mouvement pour plus de dignité et d'humanité se trouve récupéré par quelques autoritaires qui détournent l’impulsion originelle afin d'assurer leur pouvoir personnel. Ils évincent alors les auteurs ayant initié la dynamique: les gens modestes, les pauvres, les petits, les sans-grade, les "sans-dents", comme il fut dit un temps par un qui se disait "socialiste" et -hélas!- suivant la jurisprudence 1983, l'était bel et bien! 

   Prenons 1789. La Révolution française ne s'effectue pas tout de suite, contrairement aux résumés distribués par le catéchisme laïc, avec une revendication républicaine d'abolition de la monarchie dans l'objectif avoué de réaliser la Liberté, l'Égalité et la Fraternité! Pour la vulgate, il y aurait eu un "avant 14 juillet", avec les ténèbres, un roi faible, une reine frivole et vendue à l'étranger, un régime esclavagiste, puis, après la Révolution, un moment de lumière avec des dirigeants républicains ayant offert la dignité à tous! Lors de la prise de la Bastille, rappelons-le, Robespierre, Marat et Danton sont monarchistes et ils vont le rester deux bonnes années! L'insurrection de 1789 ne s'effectue pas pour les idées de Liberté, d'Égalité et de Fraternité, mais pour des revendications concrètes portées par ceux qu’on appelle "les Enragés" -les gilets-jaunes de l'époque... Ils veulent du pain pour leur famille, du lait pour leurs enfants et du savon pour se laver. Les prix sont trop élevés, les accapareurs et les agioteurs profitent du désordre pour les augmenter, les Enragés veulent les plafonner. Ils n'ont aucun souci de faire chuter la monarchie ou d'en penser les modalités constitutionnelles, ni même de proposer un changement de régime! La démocratie directe avec le contrôle des représentants proposés par les Enragés ne datent pas de juillet 1789.

   A cette époque, les sans-culottes, une autre modalité de la revendication populaire, évoluent eux-aussi sur des terrains très concrets et nullement idéologiques. Ils n'ont que faire des débats intellectuels et de savoir s'il faut préférer le Contrat social de Rousseau à L'Esprit des lois de Montesquieu: ils veulent améliorer leur vie quotidienne qui est faite de misère et de pauvreté, de faim et de froid, de chômage et de précarité.

   Il n'est d'ailleurs pas sans raison que ce petit peuple révolté soit lui aussi qualifié avec un attribut vestimentaire: ils ne portent pas la culotte et les bas des bourgeois (ou de l'aristocrate Robespierre qui est le grand homme de la bourgeoisie et n'oublie jamais de porter la perruque poudrée de sa caste...), mais le pantalon à rayures bleues et blanches. Les gilets-jaunes eux-aussi arborent un attribut vestimentaire qui, certes, est celui des automobilistes en détresse, mais aussi, on a tendance à l'oublier, celui des travailleurs de l'extérieur qui ont besoin de signaler leur présence sur les chantiers ou dans les rues afin de ne pas se faire tuer par des engins de travail ou des automobilistes. Le gilet jaune, c'est le costume du travailleur qui ne porte pas de cravate: le maçon et le balayeur, le menuisier et l'employé de la voirie...

   Au commencement, toute révolution est insurrection. La prise de la Bastille est emblématique de cette vitalité révolutionnaire: on attaque le symbole du pouvoir. Qui niera que les Champs-Élysées, lieu de parades des puissants, soit un lieu éminemment symbolique pour ceux qui regardent à la télévision le pouvoir y passer, s'y montrer, s'y exhiber et qui le subissent sans jamais l'exercer? On y voit en effet, au choix, les défilés militaires lors de la parade anniversaire de ce fameux 14 juillet; la tribune des chefs d'État invités par la France -jadis Kadhafi ou Bachar el Assad, et récemment, pour le centenaire de la fin de la Première Guerre mondiale: Trump, Erdogan, Merkel ou Poutine et un paquet d'autres huiles; les bus de l'équipe de football quand elle décroche la coupe du Monde ; le convoi funéraire de Johnny Hallyday, fiscalement domicilié aux États-Unis ou en Suisse, mais néanmoins salué par les trois derniers présidents de la République, le quatrième n'étant plus en état de le faire mais qui, sinon, y serait également allé. C’est aussi l'artère qui conduit le chef d'État nouvellement élu de la place de la Concorde, où ont été décapités le roi et la reine, ce qui marque la fin de la monarchie, à l'Arc de triomphe, un bâtiment qui est d'abord là pour signifier les victoires de Napoléon, certes, mais aussi et surtout, la fin de la Révolution française sifflée par ce jacobin corse avec son coup d'État du 18 Brumaire. Avec ce putsch, Napoléon assure aux bourgeois que la Révolution est finie et qu'ils peuvent désormais jouir tranquillement des biens confisqués au clergé, devenus biens nationaux, et achetés par eux parce qu'ils avaient de quoi les acquérir -au contraire des pauvres... Les Champs-Élysées racontent en raccourci comment naît, vit et meurt une Révolution: de la guillotine robespierriste, en bas, où le sang a été versé par les jacobins de 1792 et 1793 pour abolir la royauté, à l'Arc de l'empereur, en haut, qui a mis fin à la Révolution et renvoyé les petites gens à leurs conditions de misérables (quand ils ne mourraient pas sur les champs de bataille de ses guerres de conquête par centaine de milliers...). C'est un résumé de ce qui ne doit pas arriver mais qui menace si d'aventure les gilets-jaunes ne se structurent pas.

   Car, s'ils ne s'organisent pas, d’autres organiseront pour eux et, c'est certain, les gilets-jaunes deviendront les Plaideurs de la fable de La Fontaine, ils n'auront plus que leurs yeux pour pleurer: l'insurrection aura fait le jeu de Mélenchon ou de Le Pen, autrement dit de ces gens du système, car, même s'ils font carrière dans la critique du système, ils en font partie -le très longtemps sénateur socialiste Mélenchon ayant voté "oui " à Maastricht, qui est le péché originel expié ces temps-ci dans les rues; et Marine Le Pen ayant hérité de la boutique paternelle qu'elle fait fructifier de façon familiale entre Montretout et bamboula. L'un et l'autre avec leurs troupes dirigeantes sont gens à cravate, même et surtout quand ils affectent de n'en pas porter! 

   Comment s'organiser? Il faut éviter la solution jacobine car, pour cette engeance centralisatrice et parisienne qu'est le jacobin, tout pouvoir procède d'une figure unique qui elle-même s'inspire du roi. Précisons que, lors des dernières présidentielles, tous les candidats étaient jacobins! Ceux qui parlaient de girondinisme le faisaient pour rire -Raffarin ou Juppé par exemple...- dans la perspective que, dans leurs régions gouvernées comme des fiefs féodaux, ils pourraient continuer à disposer d'un pouvoir semblable à celui des monarques. Or, la Gironde n'est pas multiplication des rois en région ou dans les départements, voire dans les communes, ce serait pure sottise, mais réellement pouvoir régional en région, départemental dans les départements, communal dans les communes. En revanche, c'est le pouvoir exercé par ceux sur lesquels il s'exerce avec révocabilité des élus. En effet, ces derniers ne devraient pas être des titulaires du pouvoir de droit divin mais des mandataires auxquels l'électeur peut reprendre sa délégation à tout moment dans le cas où la parole est peu, pas ou mal portée. Le pouvoir ne doit plus être une sinécure personnelle et doit redevenir une obligation contractuelle. L'élu est l'obligé de qui le mandate et non son parasite.

   Le marxisme-léninisme est la forme aboutie du jacobinisme. N'oublions pas que cette idéologie reste l'horizon intellectuel de Mélenchon et de sa garde rapprochée. La dictature du prolétariat, préconisée par Marx dans le texte, a été réalisée par Lénine, puis Trotski, puis Staline. Je ne fais pas de distinctions entre ces trois modalités d'une même dictature. Elle a été dictature sur le prolétariat plutôt que dictature du prolétariat. Le nier c'est prendre le parti du Goulag.

   Dans l'aventure des gilets-jaunes, les néo-marxistes-léninistes sont embusqués: ils sont passés à côté des débuts de l'insurrection qu'ils ont même, pour tel ou tel, je songe à Clémentine Autain, regardé avec un certain mépris. Depuis qu’ils sont arrivés quatrièmes aux présidentielles et très mauvais perdants, ils ont raté la convergence des luttes; ils n'ont pas réussi à fédérer lors de manifestations qu’ils voulaient grandioses; ils perdent des points dans les sondage ; ils accumulent les scandales d'argent et d'affaires, de népotisme et de passe-droits, qui touchent tel ou tel ou tel dans leur camp.

   Or, ce grand petit peuple a réalisé tout seul ce que ces politiciens professionnels ne sont pas parvenus à faire avec beaucoup d'argent, des communicants, des experts, des salariés, et même des autoentrepreneurs... Aujourd'hui, disons-le de façon métaphorique, les néo-robespierristes remontent la foule en direction des premières places du cortège...

  A droite, Marine Le Pen offre une version de ce même jacobinisme. Elle croit au chef charismatique, certes, elle sollicite le référendum sur les questions sociétales mais, sans la pédagogie qui le prépare, le référendum, auquel je tiens comme exercice de démocratie directe, est un plébiscite du chef plus qu'une expression démocratique. En nos temps d'inculture politique et civique généralisée, la démocratie plébiscitaire s'avère l'une des modalités de la tyrannie -celle de l'opinion que ne construit plus l'École qui fut jadis républicaine, mais que fabriquent aujourd'hui les médias dominants et les contre-médias tout aussi insoucieux de vérité, de réalité, de justice et de justesse les uns que les autres. Condorcet a déjà expliqué en son temps combien la démocratie sans éducation rendait toute élection problématique. 

   Ces deux modalités du jacobinisme que sont Mélenchon et Le Pen n'ont pas été plus clairs l’un que l’autre sur la question de la souveraineté nationale: on les comprend car ces professionnels de la politique sont obsédés par leur boutique et il s'agit toujours pour eux de ne pas effrayer les électeurs potentiels. Or, les choses sont simples: faut-il oui ou non rester dans la configuration de l'Europe libérale qui empêche les décisions nationales en faveur des citoyens les plus pauvres? Doit-on garder l'euro, monnaie unique, en sachant qu'il ne permet pas de mener une politique économique autonome, ce qu'en revanche permettrait une monnaie commune? En fait, si l'on y regarde de plus près, l'un et l'autre ont déjà tranché à leur manière: Mélenchon en évinçant il y a peu de son staff Djordje Kuzmanovic et François Coq qui défendaient une ligne clairement souverainiste; et Marine Le Pen en agissant de la même manière avec Florian Philippot qui campait sur des positions semblables.

   Dès lors, faute de recouvrer notre souveraineté politique, on ne peut pas dire qu'on soutient les revendications des gilets-jaunes puisque celles-ci ne pourraient être satisfaites tant que la France resterait dans la configuration de l'État maastrichtien.

  La souffrance de ce peuple en jaune explose après un quart de siècle de privations imposées à ces laborieux qui n'en peuvent plus de la misère et de la pauvreté qu'on leur inflige au nom des critères de l'Europe, qu’ils soient économiques, fiscaux, monétaires ou écologiques.

   Car, dans cette aventure, Macron mène la politique de l'Europe et non celle de la France, ce qui, de facto, lui interdit toute marche de manœuvre politique nationale. Il y a peu, dans Les Terriens du dimanche (2 decembre 2018), Aurélien Taché, député La République en Marche, a dit tout haut ce que Macron pense tout bas: "Le fait de transférer une grande partie de la souveraineté nationale au niveau européen, c'est le cœur de ce qu'on proposera aux élections européennes, ça c'est très clair" -c'est très clair en effet...

   Macron prend prétexte de sauver la planète pour serrer la ceinture des pauvres (tout en desserrant celle des riches dispensés d'impôts sur la fortune) afin de les soumettre à la règle maastrichtienne des 3%. Mais il s'agit moins pour lui de sauver la planète que de sauvegarder l'Europe libérale, une espèce en péril -sinon, pourquoi ne pas taxer les supertankers, les avions de ligne, les aéronefs commerciaux, les paquebots de croisière, les entreprises qui polluent, les constructeurs automobiles ayant fraudé sur leurs émissions de carbone, plutôt que l'infirmière qui effectue ses visites en campagne? 

   Dès lors, quiconque croit pouvoir répondre favorablement aux demandes des gilets-jaunes sans envisager une sortie de l'Europe maastrichtienne ment éhontément:  Les Républicains et le Parti Socialiste, La France insoumise et le Rassemblement national, le Modem et le Parti communiste français sont à mettre dans le même sac. Il n'y a donc aucune raison de faire confiance à cette classe politique jacobine, parisienne, mondaine, partidaire qui se trouve à l'origine du malaise qu'elle prétend désormais vouloir combattre... si on l'installe à nouveau au pouvoir!  On ne peut créer les conditions du chaos depuis des décennies puis vouloir y mettre fin avec la politique qui a causé ces dégâts!

   Par ailleurs, je comprends que les gilets-jaunes aient des réactions épidermiques avec les porte-paroles autoproclamés, qu'ils évincent tel ou tel parce qu'il est journaliste ou bien parce qu’il est encarté dans un parti ou un syndicat, qu’ils réprimandent celui ou celle qui ne s'autorise que de lui-même pour parler au nom des autres: ceux qui ont fait profession de justifier le système depuis un quart de siècle ne sont pas crédibles pour guérir la maladie qu’ils ont consciencieusement inoculée. Qu'ils laissent la place! Qu'un authentique dégagisme voie le jour qui renvoie à la retraite les professionnels de l'État maastrichtien -partis politiques et syndicats, journalistes et intellectuels du système, ainsi que tous les voyageurs de commerce de cet idéal populicide qui a mis tous ces gens dans la rue quand l'épuisement s'est pour eux trouvé maximal.

   Que faire? S'il faut éviter la solution jacobine il faut également éviter la solution spontanéiste: du chaos il ne sort que plus de chaos encore, mais jamais un ordre nouveau. Ceux que l'on nomme les "casseurs" et qui signent leurs forfaits avec des slogans sans ambiguïtés, notamment avec des sigles comme celui du "A" dans un cercle qui est clairement la signature anarchiste, ne partagent pas les intérêts de ce petit peuple malheureux. Leur sociologie est celle des urbains cultivés et sur-diplômés, politisés et organisés. La source de leur révolte est bien plutôt dans le gauchisme culturel de Giorgio Agamben ou de Toni Negri (un fervent partisan du "oui" au Traité constitutionnel européen d'ailleurs...), que dans l'impossibilité d'acheter des jouets à leurs enfants ou à leurs petits-enfants au prochain Noël...

    J'ouvre une parenthèse pour signaler que j'ai entendu une journaliste commenter le "A dans son cercle" de l'anarchie, tagué sur l'Arc de Triomphe, en disait qu’il était la signature des "antifas". Parfait! Tout va bien, car ce sont donc des amis politiques des médias du système, puisqu'ils sont censés lutter contre le fascisme casqué, armé, botté, militarisé -celui de Marine Le Pen bien sûr! Or, pour l'heure, s'il est bien des gens armés, casqués, bottés, militarisés, ils semblent bien plutôt se trouver chez ces prétendus antifascistes que du côté des gilets-jaunes dont il est facile de revêtir le vêtement pour commettre des forfaits, d’autant plus que le pouvoir et les médias de l'État maastrichtien n'attendent que cela pour stigmatiser le mouvement. 

   Cette "anarchie" là n'est pas la mienne. C'est celle de l'idéaliste hégélien Bakounine qui croyait (comme un libéral dans sa candeur...) que la liberté de la révolte accoucherait naturellement de la révolution comme en sortant de la cuisse de Jupiter! Laissez faire les repris de justice et les artistes, les poètes et les fous, les chômeurs et les clochards écrit-il dans L'Empire knouto-germanique, et de leur colère naîtra comme par enchantement un nouvel ordre révolutionnaire! Il faut sacrément ignorer la nature humaine pour penser l'anarchie d'une façon aussi simple, sinon simpliste, pour tout dire infantile ou adolescente... La violence n'est pas accoucheuse de l'Histoire: elle l'est surtout de la violence! L'Histoire est ensuite construction, et l'on peut construire ailleurs sans avoir besoin de détruire ici.

   Comment faut-il s'y prendre pour construire ailleurs sans avoir besoin de détruire? En tournant le dos à l'idéalisme allemand du russe Bakounine et de ses émules qui croient aujourd’hui que le pavé lancé sur les forces de l'ordre et l’incendie des voitures, le cocktail Molotov balancé sur les CRS et la fronde pour leur envoyer des boulons, le taguage des bâtiments historiques et le pillage des boutiques de souvenirs, la destruction des vitrines des magasins de luxe ou le ravage des terrasses de café, la barre de fer et la batte de base-ball, tout cela sert à accélérer l'instauration de la justice sociale! C'est une pensée courte, simpliste et simplette, car cette violence ne contribue pas à l'avènement du Grand Soir, mais juste à la riposte violente du pouvoir qui s'en trouve d'autant légitimé qu’il invoque la protection des citoyens, sans parler de ses grandes invocations médiatiques de la République, de la démocratie et de la liberté en danger...

   Pour trouver une issue politique à cette insurrection inédite, il faut réactiver quelques propositions du socialisme libertaire de Proudhon: il estimait que la Révolution française avait accouché de beaux principes, certes, bien sûr, évidemment, mais de rien qui soit utile à ceux qui voulaient du pain pour leur famille; il détestait le sang et la Terreur, le Tribunal révolutionnaire et Robespierre, la guillotine et le gouvernement révolutionnaire; il n'aimait pas Marx et avait prévu que son système déboucherait sur un régime autoritaire -ce qui fut le cas quelques décennies plus tard; il n'était pas communiste et refusait d'ailleurs cette idée avec vigueur, car il souhaitait étendre la petite propriété privée au plus grand nombre; il ne se gargarisait pas de grands mots et de belles idées, car ce fils de tonnelier qui fut bouvier savait ce qu'était le peuple, il en venait, au contraire de Marx dont le père était avocat; il a construit son socialisme libertaire de façon pratique et concrète, antiautoritaire et non-violente.

   Nulle cité radieuse ou nul lendemain paradisiaque chez lui: il souhaite réaliser un ordre libertaire et, pour ce faire, il invite à une organisation rigoureuse: son anarchie est le contraire du désordre! C'est un autre ordre: celui de la justice. Dans Théorie de la propriété, un ouvrage de sa fin de vie qui fut courte, il théorise cette organisation libertaire et pense la nécessité d'un État libertaire. Pour éviter le double écueil du capitalisme sauvage qui crée les inégalités et l'exploitation, et du socialisme autoritaire qui produit l'oppression et la misère (n'est-ce pas notre actualité?), il propose l'autogestion, le mutualisme, la fédération, la coopération le tout dans l'organisation et sans violence.  

   L'organisation non-violente : voilà c'est ce que les gilets-jaunes devraient faire pour éviter les écueils qui se profilent: à savoir la récupération par les jacobins et les professionnels de la politique, ou bien le basculement dans le chaos spontanéiste, le tout signifiant à coup sûr la mort de cette énergie insurrectionnelle.  

   Proudhon ne donne pas les clés du pouvoir aux intellectuels -il ne le faut jamais! Robespierre en était un, Lénine, Staline et Trotski aussi, Mao et Pol-Pot également -il avait étudié à la Sorbonne, aimait Rousseau et Sartre... Il les donne à ceux sur lesquels il doit s'exercer: la démocratie représentative française, chacun l'a constaté depuis des années, ne représente plus que les intérêts d'une bourgeoisie qui a détourné la lettre de la Cinquième République au profit de l'esprit maastrichtien -quinquennat, cohabitation, usage du 49.3, refus de la proportionnelle... Le verrouillage idéologique et politique fait désormais de l'Assemblée nationale et du Sénat deux chambres d'enregistrement de la volonté du chef de l’État. Si ce dernier est au service du peuple, c'est la meilleure des choses; s'il veut le peuple à son service, c'est la pire! Ces deux instances extrêmement coûteuses en impôts perdent leur temps dans d’infinis amendements qui dénaturent les projets afin de parvenir à un statu quo: droite ou gauche, peu importe, il faut que les libéraux de droite et de gauche gouvernent chacun leur tour -Mitterrand & Chirac, Sarkozy & Hollande, puis Macron, qui, peu ou prou, question de style, ont mené la même politique... Pendant ce temps, la droite et la gauche non libérales font de la figuration, ils protestent, ils se font voir et entendre, ils existent médiatiquement, ils tombent la cravate et la veste en estimant qu'ils ont ainsi tout dit, puis roulent carrosse et mènent la belle vie aux frais du contribuable!

   Les gilets-jaunes gagneraient à réactiver cette démocratie directe à laquelle Proudhon aspirait: c'est une question de vie ou de mort pour eux car ils sont nombreux, pas forcément là où on le croit, les charognards qui attendent le pourrissement, la décomposition, la fin, la disparition, la mort de ce mouvement sur lequel ils ne peuvent rien. Il n'est qu'à regarder les commentaires de la classe politique, médiatique et intellectuelle... 

   Concrètement: le principe susceptible d'être activé est celui de la coordination et de la coopération. A l'ère d'internet et des réseaux sociaux, le dispositif est facile à mettre en place. Il permet à la base, sur le lieu de chaque présence des gilets-jaunes, rond-point et route, bretelles d'accès ou parking de supermarché, dépôts ou entrée de magasins, lycées ou usines, villages et communes, de constituer un collectif qui s'exprime là où il est. Ces collectifs doivent se fédérer et ces fédérations doivent se fédérer elles-aussi afin d'élire des représentants. Chaque délégué est un élu soumis au mandat impératif: il porte le message d'un groupe et ne parle pas pour lui; il donne voix au collectif dont il formule la parole: il est le ventriloque du groupe. Là où il est, quand il parle, il doit être vu et entendu par ceux qui, en regard de sa faculté à représenter véritablement, ou pas, lui conserveront ou lui retireront son mandat.

   Le principe est simple, la mise en œuvre plus difficile: il ne faut pas sous-estimer les effets pervers de ces logiques -l'activation de la testostérone de quelques-uns qui accèdent à la lumière médiatique et les risques de dérapages; le rabattage du problème politique général sur une histoire particulière, fut-elle émouvante et touchante, concrète et pourtant pédagogique; la stratégie médiatique qui consiste à choisir le moins déluré des gilets-jaunes pour en faire une figure emblématique du mouvement et le mettre en lumière pour générer du discrédit ou de la pitié;  le mandat donné à qui n'est pas capable de porter la parole collective intellectuellement ou verbalement, psychologiquement ou humainement; le danger du noyautage par tel ou tel beau parleur qui roulerait en sous-main pour des syndicats ou des partis politiques, sinon pour le pouvoir qui a intérêt à installer le ver dans le fruit -il existe des gens dont c'est d’ailleurs le métier et qui sont depuis toujours payés par l'État pour effectuer ce genre de travail...

   Voici donc un dispositif, une machine: elle ne peut fonctionner sans se mettre au service de revendications dignes de ce nom -il faut viser plus de justice sociale. Toutes sont légitimes pourvu qu'elles visent à rendre leur dignité aux victimes de l'État maastrichtien.

   Le principe du cahier de doléances est une bonne chose: il faut élire des rédacteurs capables de mettre en mots les revendications esquissées et remontées en réseau sur l'intranet des gilets-jaunes. On néglige trop les leçons données par les cahiers de doléance de la Révolution française: mieux que les États généraux, ils parlaient de choses très concrètes, ce qui est le fond de toute politique digne de ce nom -et comme c'est le cas avec les gilets-jaunes... 

   Enfin, il ne faut pas se tromper d'adversaires: les blocages qui mettent en péril d'autres travailleurs pour lesquels la vie n'est pas facile non plus, je songe aux petits patrons, aux artisans, aux commerçants, aux employés, aux personnels de santé, et tant d'autres qui relèvent eux aussi d'un genre de condition néo-prolétarienne, ne doivent pas payer une dette qui n'est pas la leur. La faillite des gens modestes, la fermeture de petites unités industrielles ou commerciales, de production ou d'artisanat ne sont pas souhaitables. C'est se tromper d'adversaires.

  Il faut au contraire s'appuyer sur le savoir-faire technique ou fiscal, commercial ou juridique, intellectuel ou informatique de ces catégories socio-professionnelles afin d'augmenter la puissance du mouvement par l'effet dynamique de son organisation. Des coordinations sont nécessaires afin d'éviter que des travailleurs modestes occasionnent la chute et la mort de travailleurs un tout petit peu moins modestes qu'eux. Dans la logique de la lutte des classe, l’ennemi n'est pas dans le camp des plus ou moins modestes que soi, mais dans celui d'en face où se trouvent les véritables puissants dont la peur et la haine sont palpables. Il y a peu, Emmanuel Macron travaillait dans une banque d'affaires qui est la leur.

   A défaut d'organisation, les gilets-jaunes auront été un feu de paille. L'histoire des révolutions l'enseigne -il n'est qu'à lire ou relire La Ferme des animaux d'Orwell: l'énergie rebelle des premiers temps insurrectionnels risque de se faire capter, détourner et renverser par les professionnels de la politique et du pouvoir.

   On peut ainsi se référer aux révolutions du Printemps arabe qui, faute d'organisation, de coordination, de programme commun, mais surtout d'unité et, pour tout dire, de fraternité, ont bien mis à bas des régimes tyranniques, mais pour laisser la place à des régimes autoritaires d'un autre style.

   Macron en appelle aux corps intermédiaires afin qu’ils invitent les gilets-jaunes au calme -les syndicats, les partis politiques et le patronat. Le masque tombe. Le chef de l'État qui est de moins en moins chef d'un État de plus en plus résiduel, prouve ainsi deux choses: le pouvoir lui échappe et le Président se retourne vers ses alliés naturels que sont les officiels de la représentation du système -les ficelles de la très vieille politique politicienne... Le pouvoir qu'il a perdu se trouve désormais dans la rue. Ce président de la République ne peut plus sortir, il est hué dans la rue, son convoi officiel est bloqué au Puy-en-Velay où il est pourtant venu incognito. Sa légitimité est contestée. Peut-être sont-ils désormais plus nombreux les citoyens qui auraient enfin compris l'utilité d'instrumentaliser la famille Le Pen pendant des années afin de la faire parvenir au second tour tout en la criminalisant, de sorte que l'élection du second tour soit jouée le soir du premier et que, comme par hasard, l'électeur berné ait le choix entre le diable prétendument fasciste et le bon dieu libéral réellement maastrichtien! Ces derniers temps ce genre de bon dieu est subclaquant.

   Le roi est nu. La chose est désormais vue et sue. Elle l'est même, sue et vue, de façon planétaire grâce aux   télévisions du monde entier. Jupiter a vécu. Qu'on se souvienne de ce que j'ai jadis nommé dans un livre "le principe de Gulliver": Gulliver peut être terrassée et anéanti par les Lilliputiens. Autrement dit: les nains peuvent avoir raison d'un géant. Disons-le d'une autre façon encore: les gilets-jaunes ont potentiellement les moyens d'abolir "Macron" qui n'est que le faux-nez du système: il suffit pour ce faire d'un programme commun, d'une fraternité d'action, d'une méthode avec une stratégie (que veut-on?) et une tactique (comment s'y prend-t-on pour y parvenir?), enfin d'une volonté.

  Le programme commun s'élabore avec les comités fédérés;  la fraternité d'action surgit à l'occasion de la mise en place de ces comités; la méthode est celle de la coopération libertaire qui suppose le mandat impératif afin de désigner des représentants, puis une fédération de ces  représentants avec une fédération de fédérations afin de disposer d'un comité directeur révocable lui-aussi; la stratégie vise l'alternative à la démocratie représentative par l'instauration d'une démocratie directe; la tactique pour y parvenir consiste à ne rien lâcher dans l'action revendicative, puis à multiplier les actions de façon ciblée, tout en se désolidarisant des violences et en les empêchant. La volonté est là: elle est jaune vif.

  Macron qui, non sans arrogance juvénile, voulait tous les dégager et a cru y parvenir semble lui aussi prendre la vague qu’il a initiée. C'est la jurisprudence du boomerang... Ironie du sort, il voulait faire de la politique autrement: ce pourrait bien être le programme de ceux qui ne veulent plus de lui et de ses semblables. Ce si jeune Jupiter nous apparaît dès lors vraiment pour ce qu'il est : vieux, terriblement vieux... 

Michel Onfray








Pour replacer le mouvement dans le temps long de l'Histoire:
















Un cousin de notre Michel national, que le hasard fait résider... rue Edouard Vaillant, nous communique le lien suivant, qui immortalise un certain rond-point des Vaches, à Rouen:

https://rouendanslarue.net/saint-etienne-du-rouvray-la-resistance-exemplaire-du-rond-point-des-vaches-rpdv-rpz/

Extrait:

Tous les moyens possibles ont été utilisés par ce gouvernement pour tenter d’écraser cette révolte. Arrestation massives, préventives et illégales lors des manifestations parisiennes. Utilisation systématique d’armes extrêmement dangereuses (« flashball » LBD-40 et grenades GLI-F4) contre les GJ et les lycéens qui avaient rejoint la bataille. On compte des centaines des blessés graves : 4 mains arrachées, des dizaines de machoires cassées et de personnes éborgnées (le recensement provisoire). Le déploiement d’un tel dispositif policier est inédit dans l’histoire de le 5ème république. Le pouvoir est aux abois.





Comme à toutes les périodes révolutionnaires, les chansons engagées fleurissent, et les imaginations plus ou moins savantes ou populaires ou les deux à la fois se révèlent. Petite sélection:




Rockcollection Laurent Voulzy

Brassens Le temps ne fait rien à l’affaire

Florent Pagny. Dis-moi : pourquoi tu fais ça ?

Président Maquereau

"Né en 17 à Leidenstadt", de Jean-Jacques Goldman

Cabrel La corrida

"Sacré Charlemagne" France Gall

Petit papa Noël Tino Rossi


Adaptation au gouvernement de Macron d'une chanson de 1889 sur le gouvernement de Ferry
   
Manu - Renaud
  
Louise Attaque J’ai voté Macron


"Passer ma route" de Maxime Le Forestier


 "Mon vieux" (Les gueux) de Daniel Guichard. Musique Originale : Jean Ferrat

J̶o̶l̶i̶e̶ ̶M̶ô̶m̶e̶ / Gilets Jaunes – Léo Ferré



"Il est où l'bonheur" de Christophe Maé


"Si j'avais un marteau" de Claude François revisité....


Henri Salvador : Le loup la biche et le chevalier


"Le déserteur" de Boris Vian


Gérard Lenormand "Si j'étais Président".


̶L̶'̶o̶p̶p̶o̶r̶t̶u̶n̶i̶s̶t̶e̶ / Le Macroniste Reprise parodique de Jacques Dutronc


Marche à l’ombre Renaud


STROMAE "Tous les mêmes »

  La nuit je mens   Bashung
https://www.youtube.com/watch?v=fQiiK9A6v_g

Autre chose...

Christophe Alévèque

  
LAURENT GERRA - Hollande & Raphaël Mezrahi


Parmi les revendications avancées chez les Gilets jaunes (élus révocables), un écho à la citation vaillantique reproduite dans la carte de notre association de l'année 2014.

























Cliquez sur le calendrier pour découvrir
 ce qui s'est passé un
3 décembre
pendant la vie d'Edouard Vaillant







NOTRE PRESENCE (EVENTUELLE) DANS LES SALONS DU LIVRE OU LIEUX DE DEDICACE



Lurcy-Lévis (03) (24-25 mars)
Mers-sur-Indre (36) (28-29 mars)
Châteauroux (36) (21-22 avril)
Decize (58) (6 mai)
Le Blanc (36)  (18-20 mai)
Montluçon (03) 1,2,3 juin)
Quincy (18) (9 juin)
Châteaumeillant (18) (août)
Sancerre (18) 26 août
Saint-Amand-Montrond (18) (22-23 septembre)
Souesmes (41) (7 octobre)
Saint-Doulchard (18)   (13-14 octobre)
Saint-Gaultier (36)  (14 octobre) 
Sagonne (18) (21 octobre)
Vierzon (18) (17 novembre): T'as voulu lire Vierzon (Brel)
Henrichemont (18) (18 novembre)
Les Bordes (36) (1er décembre)
Bourges (18) (2 mars 2019)
Saint-Florent (18) (6-7 avril 2019)







Rentrée littéraire de septembre 2016 
Je te parle au sujet d'EDOUARD VAILLANT
Tome II : Le grand socialiste.



500 p.  19,80 €
560g  
les 2 volumes 1044g 





















vaillantiser v tr dir 
Action de redonner tout son lustre, tout son éclat, toute son importance, à une personnalité qui la méritait amplement et que l’histoire avait oubliée malencontreusement sur le bord de son chemin. 
Plus simplement :
Action de remettre dans la lumière de l’histoire quelqu'un qui en avait été indûment écarté.  



Ex : "C’est en 2015 que pour la première fois on a vaillantisé quelqu’un, et ce quelqu’un, c’était Edouard Vaillant lui-même." 

Employé absolument, le verbe a pour complément d'objet implicite le nom propre "Vaillant". 

Ex : "Le dernier numéro de notre bulletin  vaillantise." 

N’hésitez pas, qui que vous soyez, à l'employer partout par exemple dans des phrases du genre : Ils veulent vaillantiser Vaillant, etc. 

Et bien entendu le dérivé "vaillantisation" en découle naturellement. 




TOUTES NOS DATES IMPORTANTES




Rentrée littéraire de septembre 2015
Je te parle au sujet d'EDOUARD VAILLANT
Tome I : La tête pensante de la Commune.



374 p.  18,80 €
484g  
les 2 volumes 1044g 








L'EDITEUR







LES POINTS DE VENTE LOCAUX


18

Vierzon 

 Maison de la presse Catinaud  (9 rue Voltaire)
(hélas fermé depuis le 21 juillet, malgré un grand soutien local, dont le nôtre)


 Espace culturel Leclerc  (48 avenue de la République)




 Presse tabac Mongeot (4 rue du Mouton)


Bourges 

 La Poterne (41 rue Moyenne)



 Point Virgule (46 rue d'Auron)



Cultura Saint-Doulchard
(mystérieusement exclu depuis 2016)


 Centre commercial Carrefour Bourges (Chaussée de la Chappe)

Référencement national - partout en France - dans les magasins Carrefour.
(S'il n'est pas en rayon, demandez-le).













Henrichemont 

 Maison de la Presse "Le Jardin des Fées"(10 place Henri IV)








36

Châteauroux 

 Cultura Saint-Maur (Zone Commerciale Cap Sud, 10 Boulevard du Franc)





Aussi recommandés et également présents, le dictionnaire berrichon de Michel Pinglaut, le "Edouard Vaillant" de Gilles Candar, le "La face cachée de la Commune" d'Hélène Lewandowski. 





Issoudun 


 Centre commercial Leclerc(Rue de la Limoise)





Il y a aussi le livre sur le berrichon de notre président Michel Pinglaut 


COMPTES-RENDUS DU LIVRE


11 3 16   JEAN ANNEQUIN BLOG COMMUNE DE PARIS

29 2 16  HENRICHEMONT GIBLOG

1 11 15  MAGAZINE A VIERZON

20 10 15    DIX-HUIT BERRY REPUBLICAIN LA BOUINOTTE

28 08 15    BLOG VIERZONITUDE




DOSSIER DE PRESSE





La pensée d’Edouard Vaillant représente l’adaptation la plus parfaite du socialisme scientifique à notre tempérament national. 
(Jean Jaurès)




Vaillant n'est pas seulement un grand homme pour Vierzon, il est un grand homme pour l'histoire.



                                                                                                              (Vaillantitude)



La vaillantisation est une entreprise collective qui rassemble, et c'est tant mieux, des personnes de convictions différentes et variées qui ne regardent qu’elles. Les rapprochements avec l’actualité récente et les éventuels commentaires personnels induits n’engagent que l’auteur du blog et lui seul. 



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