Une mise en perspective.
IL
Y A 150 ANS LA COMMUNE DE PARIS 1871 :
UNE
HISTOIRE FACTUELLE RÉVOLUTIONNAIRE (I)
La Commune de Paris 1871 est
l’aboutissement d’un siècle de convulsions révolutionnaires, conséquence d’une lutte
pour la République, les libertés et l’égalité sociale. Ce temps républicain de
l’histoire de notre pays est un moment particulier puisque seule forme éphémère
de prise de pouvoir populaire durant 72 jours.
L’engrenage révolutionnaire d’avant la Commune
Une origine lointaine
1789-1794 : La
Grande Révolution qui proclame la Première République est détournée de son but
final : une République bourgeoise voit le jour.
1830 : Après un
premier Empire né d’un coup d’État
et des monarchies tendant pour la dernière à la tyrannie, la Révolution de 1830
est escamotée et se transforme en monarchie parlementaire.
1848 : La Révolution
de février 1848 entérine une Deuxième République, révolutionnaire durant deux
mois, avant les journées de juin où un gouvernement républicain réprime
violemment le peuple ouvrier de Paris. Le régime républicain dénaturé va
péricliter.
1851 : Un deuxième
coup d’État établit un
Second Empire autoritaire.
Le moment d’une rencontre
décisive pour la démocratie et la lutte
La rencontre entre les
travailleurs manuels et les Républicains, entamée en 1848, s’accentue avec la
résistance au coup d’État.
Ce rapprochement, marqué de différences, associe libertés
politiques et reconnaissance sociale.
1860-1870 : l’éclosion
et l’organisation de la classe ouvrière
Une classe ouvrière se forme sous
l’effet des migrations qui engendre une concentration dans les grands centres. La
naissance de l’Association Internationale des Travailleurs (AIT) en 1864 marque
le début de l’opposition de classe entre les possédants et le futur prolétariat,
les grèves encourageant la résistance. Le courant républicain radical autour des
blanquistes, néo jacobins, internationalistes s’affirme. Les réunions publiques
deviennent le creuset des principes de la future Commune.
L’engrenage de juillet 1870 à mars 1871 : la
conséquence d’une guerre perdue et d’un mouvement populaire
1870
Le 8 mai, un plébiscite
donne l’illusion d’un régime soutenu. Mais nombre d’indicateurs en montrent
toute la fragilité.
Un enchaînement éclair
19 juillet : Napoléon
III déclare la guerre à la Prusse. Déjà « l’union sacrée » est
contrainte : cependant les grèves continuent et dès les premières
défaites, des manifestations ont lieu réclamant la République.
2 septembre : Moins
de deux mois après, Napoléon III capitule à Sedan, l’Empire s’écroule
instantanément.
4 septembre : La
Province est la première à proclamer la République à Marseille et à Lyon où le
drapeau rouge est arboré. Paris le fait, mais sans l’entériner : l’ordre est
sauvé, un gouvernement de défense nationale s’auto nommant autour des républicains
modérés et du général Trochu, monarchiste. Une guerre patriotique teintée de
nationalisme s’en suit. Mais très vite la conduite de cette guerre par un gouvernement
voulant éviter la Révolution sociale sépare les Républicains ainsi que les
milieux bourgeois et ouvriers.
5 septembre : Des
comités de vigilance se mettent en place dans les quartiers de Paris pour surveiller
le nouveau pouvoir : un comité central républicain des 20 arrondissement,
organisme civil, chapeaute l’ensemble des comités.
18 septembre :
L’armée prussienne assiège la capitale.
septembre : Le sud
de la France est au premier rang pour défendre le pays: des ligues, retour de
1851, se forment affichant des programmes radicaux, prémices des visées de la Commune.
La Garde nationale, milice citoyenne, s’ouvre enfin aux habitants des quartiers
populaires pour répondre aux besoins militaires.
8 octobre: C’est la
première demande de « Commune » faite par le comité central républicain.
Les premiers clubs apparaissent réclamant des mesures face à la misère qui
sévit.
Un tournant oublié
Le 31 octobre, provoquée
par l’échec de la sortie au Bourget et la capitulation à Metz du Maréchal
Bazaine, une insurrection a lieu à Paris venant des quartiers rouges : l’Hôtel
de Ville est occupé. Ce mouvement populaire improvisé et sans lien avec le
comité central des 20 arrondissements n’aboutit pas ; cependant, c’est le
début d’un bras de fer entre les membres du gouvernement et les militants
radicalisés des quartiers populaires. Le plébiscite de début novembre entend
renforcer le pouvoir en place, mais l’abstention est forte.
Une Province à nouveau en
avance
Le 1er novembre,
l’hôtel de ville de Marseille est occupé et une première Commune est proclamée :
l’envoyé de Gambetta réussit à rétablir l’ordre.
1871
La volonté de « faire
Commune » face à l’incurie du gouvernement de défense nationale
L’affamement de la population est
épuisant et les clubs demandent la destitution des hommes de l’Hôtel de Ville. Le 7 janvier, une Affiche Rouge du
comité central des 20 arrondissements se termine par : « Place au Peuple !
Place à la Commune ! ».
Le 22 janvier, faisant
suite à une énième sortie désastreuse des gardes nationaux, une nouvelle tentative
de prise de l’Hôtel de Ville et de demande de Commune échoue dans le sang. La Garde
nationale, au fonctionnement très démocratique et qui conserve ses armes, devient
un instrument de premier plan.
28 janvier :
L’armistice avec les Prussiens est signé après cinq mois d’une illusoire
volonté du pouvoir de continuer la guerre.
8 février : Dans
un pays dont 42 départements sont occupés, une assemblée nationale à majorité
monarchiste est élue avec, à sa tête, Adolphe Thiers, politicien caméléon.
Seules les grandes villes ont des élus républicains. Cette assemblée s’installe
à Bordeaux.
Le 3 mars, la Garde
nationale se constitue en Fédération avec un comité central dont la composition
fait cohabiter des républicains de toutes tendances.
Le 10 mars, Thiers et la
majorité monarchiste concluent le « pacte de Bordeaux » qui remet à
plus tard le choix du régime. L’Assemblée nationale vote son transfert à
Versailles, les ministères s’installant à Paris ; elle décide d’abolir le
moratoire sur les loyers et sur les effets de commerce ainsi que de supprimer
la solde des gardes nationaux.
L’avant 18 mars voit le
peuple parisien des quartiers s’activer. La création d’une délégation centrale
révolutionnaire est envisagée, mais le militaire prend le pas sur le civil.
L’insurrection du 18 mars
Dès le 13 mars, des
tentatives de récupération de canons payés par le peuple de Paris sont déjouées ;
le comité central de la Garde nationale a, quant à lui, tenté de négocier avec
Versailles leur restitution. Le 18 mars au matin, les soldats de ligne se
dirigent vers les Buttes Montmartre et Belleville pour récupérer à nouveau ces
canons. La population se réveille et les femmes jouent le premier rôle avec, à
leur tête, Louise Michel : l’attaque surprise échoue. Les soldats
fraternisent et fusillent deux de leurs généraux. Les troupes versaillaises
fuient vers Versailles. Si la réaction des faubourgs est spontanée, celle-ci est
bien l‘aboutissement d’une longue période de rébellion. Les chefs des bataillons
populaires de la Garde nationale s’emparent d’eux-mêmes des lieux de pouvoir.
Le choix d’élections
municipales
Aussi le 19 mars au matin,
le comité central de la Garde nationale, totalement absent le 18 mais seule structure
organisée, s’installe-t-il à l’Hôtel de Ville et décide de provoquer des
élections pour élire un Conseil général de la Commune, laissant les troupes
versaillaises se retirer sans poursuite à Versailles.
Du 19 mars au 26 mars, se déroule
le temps de longues négociations avec les maires et députés de Paris. Mais la volonté
de Versailles de rétablir l’ordre est explicite. La guerre civile, inévitable, se transforme en
guerre entre Paris et Versailles. L’extrême souci de légalité du comité central
de la Garde nationale le pousse à ne pas occuper la Banque de France.
Des Communes de Province en
soutien à Paris
Du 22 au 26 mars,
plusieurs Communes sont proclamées : Marseille une deuxième fois, Lyon,
Narbonne, Saint-Etienne, Le Creusot, Toulouse démontrant que la Province,
malgré l’essoufflement de l’automne 1870, est prête à soutenir le mouvement
parisien : des délégués de ces villes se rendent même à Paris. Toutes ces
Communes auront une durée de vie très courte, isolées, dans une confusion de
finalités et subissant souvent une répression sévère.
La Commune de Paris : son existence par les faits
politiques, populaires et militaires
Les élections au Conseil général
de la Commune
Le 26 mars, les élections
du Conseil général de la Commune ont lieu. Pour la première fois, des ouvriers
sont élus (1/3) au sein du Conseil. Si les différents courants de 1870 sont
représentés, ce sont les délégués de la petite bourgeoisie qui sont
majoritaires. Le 28 mars, la Commune est proclamée sur la place de
l’Hôtel de Ville de Paris dans une atmosphère de fête et un grand espoir règne.
La Commune confrontée à la
guerre civile : guerre ou/et révolution ?
2 avril :
Versailles déclenche la guerre civile en bombardant Courbevoie. L’idée émise
par certains élus, soit sincèrement, soit pour désamorcer une radicalisation de
militants actifs, que Versailles ne réagirait pas s’évanouit.
3 avril : A cette
déclaration de guerre répond à nouveau une réaction populaire. Plus de 3 000
femmes du peuple accompagnées de militantes politisées qui veulent marcher sur
Versailles vont s’investir dans les soins aux blessés : ce fait accentue la visibilité des femmes qui entrent
dans l’histoire. Face à l’inaction du Conseil de la Commune, les bataillons
populaires de la Garde nationale lancent une attaque sur Versailles : ni
le comité central ni le Conseil de la Commune n’ont proposé d’action. C’est un
cinglant échec et les premières exécutions sommaires commencent : Paris
passe d’un esprit offensif à un esprit défensif favorisant les tenants d’une
politique communale au détriment de la poussée révolutionnaire. Le Conseil de
la Commune décrète des mesures d’obéissance militarisant la Garde nationale.
La révolution politique étant privilégiée par le courant
majoritaire du Conseil, les questions sociales tant attendues sont imposées par
les bases populaires.
Un décret d’essence révolutionnaire
C’est celui sur les otages pris
le 5 avril en riposte aux exécutions sommaires des versaillais, d’une
dimension révolutionnaire mais restant toujours « dans les limites du
droit ». Il ne sera pas appliqué sauf durant la Semaine sanglante et dans
des conditions particulières.
8 avril :
Jules Favre, ministre versaillais, rencontre le chancelier Bismarck et se voit
accorder la libération de prisonniers de guerre pour combattre Paris.
Le 16 avril ont lieu des élections
complémentaires pour le Conseil de la Commune : le taux d’abstention est
énorme traduisant une perte de confiance des milieux populaires.
La parution du programme de
la Commune
Le 19 avril paraît « La
déclaration au Peuple Français », véritable testament de la Commune et résultat
d’un compromis entre les divers courants de pensée, présentant le communalisme
comme idéologie avec les principes d’association et de fédération.
30 avril : Les
résultats des élections municipales voulues par Thiers donnent des succès républicains
dans nombre de villes et la diffusion de l’esprit républicain dans la Province
rurale.
L’acte significatif, source
de scission pour la Commune
Le 1er mai, un comité
de Salut Public est créé devant répondre à la grave situation militaire. Cette
création provoque une scission au sein du Conseil de la Commune entre une
majorité jacobine et blanquiste et une minorité internationaliste, celle-ci
reprochant la mise en place d’un pouvoir supérieur à la Commune.
9 mai : Un deuxième
comité de Salut Public remplace le premier après l’occupation par les versaillais
du fort d’Issy.
10 mai : Le
lendemain, Rossel, délégué à la guerre, démissionne et est remplacé dans la
fonction par Charles Delescluze, un civil, attestant du changement
d’orientation.
Le traité de paix est signé à
Francfort.
14 mai : La
volonté de conciliation de 70 délégués de municipalités à sensibilité
républicaine réunis à Lyon se heurte au refus de Thiers.
A la mi-mai, une
Fédération des clubs est créée sans avoir le temps d’agir. Des élus blanquistes
ne peuvent faire aboutir le projet de renversement du Conseil de la Commune.
Le mois de mai voit la
Province s’agiter après le résultat républicain d’avril. Mais la défiance de
Paris vis-à-vis du monde rural empêche tout lien avec la paysannerie.
La Semaine sanglante et la fin
de la Commune
L’écrasement de la Commune relève
de l’ensemble des causes factuelles de ces 72 jours et le bilan édifiant de la
répression cristallise la farouche haine de classe des versaillais et
possédants : 20 000 à 25 000 exécutions, près de 40 000
arrestations, plus de 13 000 condamnations, plus de 4 000 déportés et
autant d’exilés, les « sans voix » du peuple payant chèrement leur
engagement.
21 mai : Bénéficiant
de complicités, les troupes versaillaises reprennent la ville quartier par
quartier exécutant sans jugement ou dans un simulacre de jugement hommes,
femmes, enfants.
24 mai : Alors
que le sang coule à flot et que Paris brûle, le comité central de la Garde
nationale fait placarder une affiche pour la réconciliation qui ne trouve bien
sûr aucun écho.
Des otages sont exécutés les 24
et 26 mai.
27 mai : Les ultimes
combats se déroulent à la nuit tombante au cimetière du Père-Lachaise.
28 mai : La dernière
barricade tombe dans le XXème rue Ramponneau.
3 mai 1872 : C’est
le départ du premier convoi de déportés pour la Nouvelle-Calédonie.
11 juillet 1880 :
L’amnistie générale est décrétée.
L’engrenage révolutionnaire du siècle se termine dans un bain de sang et un oubli. De retour après l’amnistie, celles et ceux des communardes et communards qui avaient rêvé d’une autre société ne se reconnaîtront pas dans la République issue de la Semaine sanglante. Le régime parlementaire qui s’instaure avec le suffrage universel va remettre en cause le principe révolutionnaire et permettre au système dominant de se pérenniser.
Jean Annequin
co-président pour l’Indre des Amies et Amis de la Commune de Paris 1871
Employé absolument, le verbe a pour complément d'objet implicite le nom propre "Vaillant".
Ex : "Le dernier numéro de notre bulletin vaillantise."
Vierzon
Désormais dernière Maison de la presse à Vierzon |
Photo: http://vierzonitude.fr.over-blog.com/2018/10/la-librairie-presse-du-mouton-dernier-specimen-d-une-espece-presque-eteinte.html |
(S'il n'est pas en rayon, demandez-le).
Châteauroux
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